Au Japon, on observe une croissance exponentielle de la privatisation dans le secteur de l'éducation des adultes. Cette tendance qui avait démarré lentement dans les années soixante-dix s'est accélérée après 2003. Quelles en sont les raisons et, par-dessus tout, quelles sont les conséquences d'une telle politique de l'éducation ? Yoko Arai nous expose la situation. Elle est professeur à la faculté des sciences sociales de l'université Hosei à Tokyo.
Au Japon, l'externalisation de l'éducation des adultes a commencé durant les années soixante-dix. Elle avait pour objectif de «rationaliser l'administration». Toutefois, peu d'interventions furent entreprises dans ce sens, et l'on opéra uniquement des externalisations vers des organisations à but non lucratif du troisième secteur ou des associations locales.1
Cependant, après l'amendement de la loi sur l'autonomie locale en 2003 et sur l'autorisation accordée en janvier 2005 par le ministère de l'Éducation et des Sciences, certaines municipalités commencèrent à transférer en 2006 l'ensemble de la gestion de certains établissements d'éducation des adultes du secteur public à des organisations privées à but lucratif. Le nombre d'externalisations de ce type s'est récemment accru.2
Il y a deux raisons à cette évolution récente. Premièrement, la crise des budgets municipaux due à la politique de «décentralisation» menée par le gouvernement conformément à la loi sur la décentralisation votée en 1995. Le gouvernement avait lancé cette politique dans le but de réduire les dépenses publiques nationales. Il avait également avancé qu'il était «démocratique» d'attribuer la responsabilité de nombreux domaines administratifs aux municipalités. En réalité, le gouvernement s'immisça dans les finances municipales, prétendant qu'une fois qu'il aurait réduit les aides financières centrales, il soutiendrait les municipalités en déployant tout un système de déréglementation. Étant donné qu'elles devaient réduire leurs dépenses, et conformément aux directives gouvernementales, les administrations municipales durent mettre en œuvre des politiques d'externalisation dans de nombreux domaines, y compris dans celui de l'éducation des adultes.3
La seconde raison de cette évolution est l'apparition des entreprises privées sur le marché de l'éducation des adultes et de l'apprentissage tout au long de la vie, ce qui est dû à la loi sur la promotion de l'apprentissage tout au long de la vie promulguée en 1990. Cette loi s'appliquait au ministère de l'Éducation, au ministère du Commerce international et de l'Industrie, et aux administrations préfectorales. Toutefois, la crise financière et les directives gouvernementales incitèrent les administrations municipales à externaliser leurs services d'éducation des adultes en demandant à des organisations de la société civile de s'en charger et en supprimant toute aide financière à l'exception d'un certain nombre de subventions contractuelles.
Nous pouvons interpréter les résultats de ces politiques d'externalisation de deux façons. Bien que les administrations municipales aient commencé à procéder à des externalisations dans certains domaines de l'éducation des adultes, d'autres n'ont pas été touchés, par exemple l'éducation familiale, l'éducation des adultes liée à la participation citoyenne, etc. Bien que n'étant pas qualifiée du terme d'éducation des adultes, la formation professionnelle fait généralement partie de ce domaine au Japon. Ainsi les municipalités répartissent-elles l'éducation des adultes dans deux secteurs, public et privé.
Introduction de contrôles externes dans les domaines de l'éducation des adultes et de l'éducation permanente
La division dont nous venons de parler a aussi entraîné l'apparition de contrôles externes de l'éducation des adultes.
Dans le domaine relevant de la responsabilité des administrations municipales, les activités sont généralement focalisées sur des objectifs spécifiques, mis à part leur but largement humaniste et leur approche synthétique. Les municipalités se servent directement de l'éducation des adultes pour leurs besoins administratifs, la transférant de leur service de l'Éducation à d'autres secteurs, par exemple aux Affaires municipales. Le personnel de l'éducation des adultes est généralement contraint de se plier à ces pratiques qui les obligent à travailler dans des domaines autres que l'éducation des adultes, malgré leur désir sincère de se consacrer à cette dernière.4
Dans de tels cas, le contrôle politique du gouvernement et de l'administration municipale influe facilement sur la pratique de l'éducation des adultes. La récente volonté du gouvernement japonais d'exercer un tel contrôle se reflète dans l'amendement de la loi sur l'éducation des adultes (2000) et dans le remaniement complet de la loi fondamentale sur l'éducation (2006).5 Cette tendance politique au niveau national exerce une influence, qui s'amplifiera à l'avenir, sur les politiques municipales d'externalisation de l'éducation des adultes.
Dans les domaines délaissés par le gouvernement, les pratiques sont davantage soumises au contrôle de mécanismes du marché. Les organisations prestataires de services éducatifs pour les adultes sont quant à elles généralement soumises aux forces du marché, même en ce qui concerne les externalisations, car les subventions contractuelles accordées par les administrations municipales sont souvent insuffisantes. Ces administrations veulent généralement satisfaire les populations locales et surveillent par conséquent les activités externalisées. Toutefois, elles le font seulement à distance, en contrôlant par exemple la quantité de prestations fournies ou le nombre de participants, en calquant leur démarche sur les mécanismes du marché. Les organisations cherchent par conséquent à réduire le nombre d'éducateurs d'adultes et leur niveau de salaire autant que leur gestion financière le leur permet. Elles exigent aussi que le personnel d'éducation des adultes adapte ses activités au marché.
Dans une telle situation, et du fait que les organisations qui emploient les éducateurs d'adultes n'ont généralement pas de contrats à long terme, le personnel se retrouve dans des conditions très précaires. Même s'il est engagé sans contrôle direct de la part des municipalités, il n'est pas employé à vie du fait des piètres salaires et de l'instabilité de ses employeurs. De plus, les éducateurs ne peuvent pas aisément offrir aux adultes un enseignement de bonne qualité étant donné qu'on exige d'eux qu'ils se plient aux forces régissant le marché.6
Du fait de la réduction des infrastructures publiques et de l'aide publique aux activités éducatives, et en raison de l'absence de soutien éducatif de qualité pour les encourager à s'éduquer par eux-mêmes, les gens ont le sentiment qu'il est naturel de payer pour la presque totalité des activités éducatives qu'ils considèrent comme des biens de consommation.
Si nous examinons l'histoire de l'éducation des adultes au Japon après la Seconde Guerre mondiale, nous constatons que les mouvements populaires dans ce domaine ont contribué à améliorer le professionnalisme de son personnel. Généralement issus du milieu professionnel stable du secteur public, ces éducateurs ont eu l'occasion de se pencher sur la philosophie et les méthodes de l'éducation des adultes en vivant et réfléchissant avec les populations locales. Ces pratiques ont élargi la base des mouvements d'éducation des adultes.7
Par rapport à cette évolution historique, les politiques d'externalisation menées récemment au Japon sont dangereuses, à tel point qu'elles nous ont fait perdre des yeux l'importance des éducateurs d'adultes et de la liberté dont ils doivent jouir dans l'exercice de leur métier.
Nous devons renforcer l'aide publique à l'éducation des adultes, même si nous pratiquons de telles politiques d'externalisation. Pour y parvenir, notre intervention doit avoir deux volets: premièrement, le financement de l'éducation des adultes et deuxièmement, la structure de son personnel.
En ce qui concerne la politique de subvention, nous devons exiger de l'administration, du niveau municipal au niveau national, des budgets plus adéquats pour l'éducation des adultes. Pour y parvenir, nous devons expliquer aux citoyens et aux gouvernants l'importance de l'éducation des adultes pour la vie des gens, sans tenir compte des mécanismes du marché et de l'esprit de compétition de l'économie mondialisée.
Nous devons aussi proposer des manières d'utiliser les budgets et surveiller ensuite leur emploi. Que nous externalisions ou pas, nous devons demander aux gouvernants de faire entrer en vigueur une réglementation adéquate. Nous devrons peut-être collaborer à l'élaboration d'un tel cadre légal pour réussir à mettre en place une éducation des adultes de bonne qualité.
De plus, les organisations désirant offrir aux adultes des prestations éducatives au nom du gouvernement doivent collaborer à la manière d'un syndicat non seulement entre elles, mais aussi avec les apprenants et les gens en général de manière à ce que leurs activités aillent dans le sens d'une réglementation de la qualité de l'éducation des adultes. Une telle réglementation leur permettra par la suite de négocier avec les gouvernants.8
Si nous voulons réussir à mettre en œuvre cette philosophie et ce cadre légal, nous devons accorder plus d'attention à la structure du personnel de l'éducation des adultes. Ni l'éducation des adultes ni l'apprentissage tout au long de la vie ne peuvent évoluer sans débat dialectique, non seulement entre les apprenants, mais aussi entre les apprenants et les éducateurs. Ces derniers ne contrôlent pas les fruits de leur enseignement d'une manière unique et ne répondent pas non plus sur le même schéma aux requêtes des apprenants. Ils essayent de comprendre les populations là où ils travaillent et d'identifier conjointement avec les apprenants et à un niveau général les problèmes rencontrés dans leurs localités. Ils tentent de concevoir des activités permettant aux gens de réfléchir avec eux sur ces problèmes. Parfois, des mouvements visant à les surmonter naissent de telles activités.
Toutefois, la stabilité de l'emploi est indispensable pour que les éducateurs d'adultes puissent mettre en œuvre dans la durée de bonnes pratiques de ce type et réfléchir à la façon de les améliorer. L'éducation des adultes doit offrir des conditions d'emploi plus stables et le système doit s'améliorer pour entretenir la bonne volonté du personnel et sa capacité à fournir des services de bonne qualité et à se pencher sur ces prestations pour les rendre encore meilleures.
Au Japon, entre les années soixante et quatre-vingt-dix, par conséquent avant la mise en place récente de politiques d'externalisation, peu de mesures ont été prises pour améliorer les conditions de travail et d'emploi du personnel de l'éducation des adultes.9 Il est à présent nécessaire de revoir le système et les possibilités de créer de bonnes structures d'emploi dans l'éducation des adultes. Nous devons examiner toutes les modalités actuelles d'emploi comme, par exemple, l'emploi permanent dans la fonction publique, les contrats à temps partiel, les contrats à durée déterminée, l'emploi dans le secteur privé, etc.
1 Certaines municipalités comme Kitakyushu-shi ont transféré la gestion ou les services de certains établissements d'éducation des adultes comme les bibliothèques et les kominkans (au niveau municipal, le kominkan est traditionnellement l'établissement où se déroulent les activités publiques d'éducation des adultes) au troisième secteur. D'autres municipalités ont externalisé leur gestion ou services en demandant à des associations locales de s'en charger. Le recours à de telles politiques est lui aussi motivé par la «rationalisation» de l'administration, parfois sur fond d'une fausse idéologie de décentralisation. Ces municipalités n'étaient pas nombreuses et les organisations choisies étaient toutes à but non lucratif. Les politiques ainsi mises en œuvre ont permis aux municipalités de réduire les effectifs du personnel de l'éducation des adultes.
3 En 1997, le gouvernement a promulgué des directives, amendées en 2005, pour promouvoir la réforme administrative des municipalités à des fins de décentralisation et pour inaugurer une nouvelle ère. Cet amendement, permet au gouvernement d'obliger les administrations municipales à se conformer aux directives concernant la gestion des établissements publics et le transfert de la gestion d'organisations publiques ou semi-publiques à des organismes privés.
4 Les gouvernants ont généralement tendance à réduire les coûts de l'emploi afin d'alléger les finances municipales. Pour cela, ils réduisent les effectifs du personnel dans le secteur public ou modifient les contrats de travail: le personnel à plein temps se retrouve employé à temps partiel ou sous contrat à durée déterminée. Dans les secteurs sous leur responsabilité directe, les municipalités conservent généralement des employés permanents, sans toutefois tenir compte de leurs aptitudes particulières dans le domaine de l'éducation des adultes. Le personnel à temps partiel ou sous contrat à durée déterminée est employé dans des secteurs que l'on considère de peu d'importance.
5 Par exemple, la loi sur l'éducation des adultes s'est distancée du «soutien sans contrôle» et a introduit des expressions telles qu' «éducation familiale» et «travail et activités de charité pour les jeunes» dans un certain nombre d'articles de sa version amendée en 2000. «L'éducation familiale» y est mentionnée dans pas moins de trois articles. Le version totalement remaniée en 2006 de la loi fondamentale sur l'éducation a aussi associé des expressions telles qu'«éducation familiale» et «amour de l'État et de sa ville d'origine» aux objectifs de l'éducation.
6 JAPSE (Association japonaise pour la promotion de l'éducation des adultes), JASSACE (Société japonaise d'étude de l'éducation des adultes et de l'éducation ouverte à tous), la Société japonaise pour l'étude des kominkans, etc. ont organisé un certain nombre de réunions et conférences sur l'externalisation de l'éducation des adultes. Il existe déjà quelques articles à ce sujet (ex. le mensuel Social Education a abordé ce problème dans son n° 610 d'août 2006 et présentés quelques cas). JAPSE a aussi fait paraître une brochure sur ce thème en août 2006. Toutefois, aucune étude de cas complète n'a été réalisée.
7 Depuis 1980, du fait de la propagation du phénomène de «gestion urbaine», nombre d'administrations municipales prennent du personnel sous contrat à court terme, pour des durées aussi brèves que trois ans. Vers 1990, les municipalités ont cessé d'attendre de ces employées qu'ils possèdent des compétences particulières en matière d'éducation des adultes lorsqu'ils devaient travailler dans ce domaine. Auparavant, ils exigeait généralement que ceux-ci disposent de qualifications dans le domaine de l'éducation des adultes ou de l'éducation sociale. Ces spécialistes pouvaient occuper leurs postes pendant dix ans, voire plus longtemps. À partir des années soixante, à la suite de l'amendement de la loi sur l'éducation des adultes dans les années cinquante, certaines municipalités employèrent spécialement du personnel pour gérer l'éducation des adultes; les effectifs du personnel s'accrurent encore à la suite des actions menées dans les années soixante-dix et même à la fin des années quatre-vingt par des mouvements locaux d'éducation des adultes et par des mouvements politiques. Cependant les municipalités empruntant cette démarche sont aujourd'hui beaucoup moins nombreuses. Le personnel spécialisé a continué à s'engager pendant des années sur le terrain de l'éducation des adultes dont il a étudié les pratiques. Dans certains cas toutefois, il a été victime de mutations injustes, ce qui a entraîné des protestations. Voir annexe 2.
8 Cette idée vient du mouvement d'organisations d'intérêt collectif soutenu par les syndicats canadiens dans l'Ontario. Ce réseau a présenté des propositions au gouvernement au sujet des activités d'intérêt collectif en général, et des méthodes de financement en particulier. Voir l'article de janvier 2004, intitulé «Building Strong Community. A call to reinvest in Ontario's non profit social services». Les informations sur ce mouvement proviennent du groupe du programme organisé au George Blown College de Toronto pour les professionnels du travail social
Classification | Total | Kominkans (y compris organismes compa- rables) | Biblio- thèques | Mu- sées | Organismes comparables à des musées | Organismes d'éducation des jeunes | Organismes d'éducation des femmes | Organismes sportifs pour la collectivité | Centres culturels |
Organismes publiques (dans la colonne des organismes de sport pour la collectivité, le chiffre correspond au nombre d'organisations) | 56111 | 18173 | 2955 | 667 | 3356 | 1320 | 91 | 27800 | 1749 |
Total | 8005 | 672 | 54 | 93 | 559 | 221 | 14 | 5766 | 626 |
Pourcentage d'organismes mandatés par rapport à celui des organismes publics | 14,3% | 3,7% | 1,8% | 13,9% | 16,7% | 16,7% | 15,4% | 20,7% | 35,8% |
Préfectures | - | - | - | - | - | - | - | - | - |
Municipalités | 268 | 1 | 2 | - | 35 | 14 | - | 211 | 5 |
Associations pour plusieurs municipalités | 123 | 1 | - | - | 18 | 2 | - | 98 | 4 |
Corporations régies par le 34˚ article du code civil dans le secteur semipublic au Japon | 5207 | 243 | 36 | 86 | 382 | 156 | 7 | 3749 | 548 |
Autres (ordinale) | 532 | 15 | 8 | 3 | 46 | 14 | 2 | 421 | 23 |
Organisations à but non lucratif | 165 | 4 | 7 | 1 | 9 | 14 | 1 | 117 | 12 |
Autores | 1710 | 408 | 1 | 3 | 69 | 21 | 4 | 1170 | 34 |
Remarque: une organisation responsable est une organisation investie de ses responsabilités dans le cadre du paragraphe 3 de l'article 244-2 de la loi d'autonomie locale actuellement en vigueur au Japon ou dans le cadre du même paragraphe de cette loi avant son amendement.
Ce tableau est traduit du japonais. Le ministère de l'Éducation et des Sciences recueille ces informations tous les trois ans en s'appuyant sur des recherches régulièrement menées dans le domaine de l'éducation sociale. Les informations ci-dessus ont été recueillies en 2005. Le tableau provient du site Internet du ministère.
(Atelier: Le droit à l'action du droit à l'éducation, le 30 janvier 2005 au WSF).
Yoko Arai (JAPSE - Association japonaise pour la promotion de l'éducation des adultes)
La Constitution, la loi fondamentale sur l'éducation et la loi sur l'éducation des adultes garantissent le droit à l'éducation, y compris la liberté de s'éduquer.
Au Japon, les municipalités ont engagé de nombreux éducateurs d'adultes en leur donnant le statut de fonctionnaires.
Certaines administrations municipales ont tenté de contrôler leurs activités, notamment dans le domaine de l'éducation politique. Ces administrations exigent d'eux, soit par l'intermédiaire du conseil de l'éducation, soit directement, qu'ils cessent leurs activités et, dans des cas extrêmes, les mutent à d'autres postes.
Depuis les années cinquante, nous avons eu de nombreux cas de ce type. Au fil du temps, les politiciens sont devenus plus habiles dans l'art de dissimuler leur volonté politique de contrôle. Nous en fournissons quelques exemples ci-après.
a) 1990 à Urawa
Lorsque le groupe d'enfants d'une kominkan (maison de la culture) tenta de publier un article sur la guerre du Vietnam dans son journal «Chibikko shinbun» (Le petit chenapan - ndlt), le conseil de l'Éducation l'arrêta et fit muter l'équipe d'éducation des adultes de la kominkan du fait de ses idées divergentes des siennes.
b) 1990àTsurugashima
Douze éducateurs d'adultes furent soudainement mutés de la kominkan à des postes non éducatifs. Ils avaient aidé des gens à apprendre et à devenir actifs.
c) 2000 à Hoya
Des membres du personnel de la kominkan d'Hibarigaoka furent subitement mutés à des postes non éducatifs. Ils comptaient même parmi eux des spécialistes de l'éducation des adultes. Ceci était dû au regroupement de municipalités.
En raison de difficultés financières, certaines municipalités ont modifié les conditions de l'emploi du personnel de l'éducation qui du plein temps est passé au travail à temps partiel. Cette tendance s'est poursuivie depuis la fin des années soixante-dix et s'est récemment amplifiée. Les administrations municipales ont souvent mis en place des politiques de ce type en transférant la direction d'un institut d'éducation des adultes du secteur public au secteur privé.
Un certain nombre d'administrations municipales ont essayé de s'approprier la direction d'instituts d'éducation des adultes comme les kominkans en transférant leur responsabilité du conseil de l'Éducation à la tête de l'administration.
Dans nombre de cas de mutation, les éducateurs concernés ont porté plainte aux prud'hommes, tandis que des apprenants, des habitants de la municipalité, les ont soutenus en créant des comités et mouvements de soutien. Il leur est arrivé de gagner et de pouvoir reprendre leurs activités.
À Tsurugashima-shi, par exemple, plus de dix mille habitants de la ville signèrent une pétition et cent cinquante personne se réunirent et formèrent le Groupe pour la protection de l'éducation des adultes à Tsurugashima. Ils organisèrent de nombreuses réunions et publièrent des articles sur cette violation afin d'appuyer leur action en justice. Par la suite, ils publièrent un livre sur le mouvement qu'ils avaient initié.
Lors des règlements de ces litiges devant les tribunaux, nous avons recours aux trois lois existantes, notamment à la loi fondamentale sur l'éducation et à la loi sur l'éducation des adultes. Nous soulignons clairement l'importance du personnel spécialisé dans l'éducation des adultes pour le droit des gens à s'éduquer.
Dans certains cas, les populations locales d'apprenants se sont regroupées en mouvements de masse et ont empêché que la gestion d'un institut soit transférée du secteur public au secteur privé. Ces personnes ont entrepris des recherches et recueilli nombre d'informations pertinentes. Elles ont organisé des réunions et exercé des pressions non seulement sur les conseils de l'Éducation, mais aussi sur les conseils municipaux. Il leur est arrivé d'obtenir gain de cause, bien qu'il soit difficile d'empêcher de tels changements. Néanmoins, les conditions d'emploi du personnel d'éducation des adultes ne se sont pas améliorées et sont devenues instables.
Le mouvement initié à Okayama illustre une telle réussite. Durant les années quatre-vingt, la majeure partie du personnel d'éducation des adultes de la kominkan n'était plus employée qu'à temps partiel. Toutefois, après quelques années, des membres du personnel à temps partiel commencèrent à étudier la théorie et l'histoire de l'éducation des adultes. Les employés à plein temps les aidèrent grâce au soutien de mouvements nationaux pour l'éducation des adultes comme JAPSE (Association japonaise pour la promotion de l'éducation des adultes).
Ainsi, le personnel à temps partiel acquit un point de vue politique et démocratique de la pratique de l'éducation des adultes. Il en résulta que leurs activités au sein des kominkans furent jugées importantes au plan local pour les populations. L'administration municipale d'Okayama commença à considérer qu'elles étaient même nécessaires et essentielles pour la direction des affaires de la ville, ce qui se traduisit par une amélioration des conditions d'emploi qui devinrent plus stables.
Dans presque tous les cas de mutations injustes ou de transferts de la direction des affaires au secteur privé, JAPSE a recueilli des informations et fourni son soutien aux mouvements s'opposant à de telles évolutions. Afin de les aider, l'association a créé une équipe spéciale de recherche qui s'est chargée d'interviewer le personnel des établissements concernés, y compris leurs administrateurs, et a publié des rapports, ce qui a enrichi son expérience concernant les mouvements d'action.
La loi sur l'éducation des adultes a été amendée de nombreuses fois depuis son adoption. Nous avons analysé les changements à chaque fois, et il nous est arrivé de protester contre eux. Même quand ces modifications étaient néfastes, nous avons continué d'avancer des idées visant à protéger le droit à l'éducation, et en particulier la liberté de s'éduquer, en nous appuyant sur la loi fondamentale de l'éducation.
La loi sur l'éducation des adultes est soumise à la loi fondamentale sur l'éducation, si bien que nous devons organiser nos activités en fonction de cette dernière. Toutefois, des mesures politiques ont été prises récemment pour amender la loi fondamentale sur l'éducation.