Vera Masagao Ribeiro / Antonio A. G. Batista

Cet article est consacré à l'alphabétisation et à la formation des adultes. Dans un premier temps, les auteurs analysent l'évolution des taux d'analphabétisme et des méthodes d'alphabétisation à l'aide de chiffres. Dans un deuxième temps, ils identifieront les régions et les groupes les plus touchés par l'analphabétisme, et examinerons les options politiques choisies pour faire face aux problèmes, plus particulièrement dans le domaine de l'éducation des adultes, ainsi que les principales tendances et idées novatrices. Enfin, ils identifieront les grands défis que doit relever le Brésil s'il veut atteindre les objectifs fixés dans son Plan éducatif national et jouer son rôle en faveur de l'éducation pour tous, réaffirmée à Dakar lors du Sommet mondial sur l'éducation en 2000. Vera Masagâo Ribeiro est directrice déprogramme d'Açâo Educativa- Brésil. Antonio Gomes Batista est directeur du Centre d'études sur l'alphabétisation (Ceale/UFMG), Brésil. 

L'alphabétisation au Brésil: réalisations et défis

En 2001, le Congrès national brésilien a voté un Plan éducatif national qui fixe 26 objectifs prioritaires à atteindre d'ici 2011, notamment: garantir à tous les enfants de six ans et plus une scolarisation de neuf ans (huit ans aujourd'hui); éliminer l'analphabétisme en donnant à 50 % des jeunes de 15 ans et plus, la possibilité d'accomplir les quatre premières années du primaire en cinq ans, et huit années en 10 ans. Pour un pays qui compte 170 millions d'habitants et doit combler un énorme déficit éducatif accumulé pendant plus d'un siècle, ces objectifs sont ambitieux. Cependant, si l'on considère le dynamisme de l'économie brésilienne, qui occupe le 15e rang mondial, le gouvernement et la société brésilienne devraient pouvoir relever le défi à condition qu'ils accompagnent leur politique de développement économique d'une plus grande justice sociale.

Les droits à l'éducation sont solidement ancrés dans la législation brésilienne. Selon la Constitution fédérale, l'État garantit à tout citoyen huit années d'enseignement primaire gratuit même s'il n'a pas été scolarisé en temps voulu. Les autorités publiques peuvent être poursuivies en justice si elles ne respectent pas les droits à l'éducation. Néanmoins, l'existence de cette loi progressiste ne garantit pas sa mise en application. Au cours des dernières années, le secteur éducatif a fait de grands progrès au Brésil puisque le taux de scolarisation a été pratiquement égal à 100 % (97,2 % pour les enfants de 7 à 14 ans en 2003), mais le système scolaire rencontre encore de grandes difficultés et est très peu productif. Des millions d'adolescents abandonnent l'école avant de terminer leurs études primaires, ce qui porte à 70,7 millions le nombre déjeunes et d'adultes ayant un niveau scolaire insuffisant. Ce chiffre concerne les jeunes de 15 ans et plus qui avaient moins de huit années de scolarisation en 2000,16 millions d'entre eux étant illettrés (IBGE, 2001 a). Le taux d'analphabétisme du Brésil est supérieur à celui de 70 % des pays d'Amérique latine, dont certains ont cependant un revenu par tête et un IDH (indice de développement humain) inférieur, comme le Pérou ou l'Equateur (INEP, 2003a).

Le Brésil doit donc résoudre un bon nombre de problèmes s'il veut garantir l'alphabétisation et l'éducation pour tous.

Évolution des taux et des méthodes d'alphabétisation

Le Brésil collecte des données sur l'analphabétisme depuis la fin du 19e siècle. Depuis, le taux d'analphabétisme n'a cessé de régresser et est passé de 65,3 % en 1920 à 13,6 % en 2000 (graphique 1A). À aucun moment il ne semble que ce recul ait été le fruit des grandes campagnes menées au siècle dernier (Ferrao, 2002). Tout porte plutôt à croire que cette régression soit due à l'extension constante des systèmes d'enseignement public et aux progrès graduels réalisés dans le domaine de l'éducation des adultes. On remarquera également qu'en raison de la croissance démographique générale, le nombre absolu d'analphabètes n'a commencé à décroître que dans les années 1980 (graphique 1B). Selon les projections d'Henriques (2005), basées sur des données collectées dans les années 1980 et 1990, si le rythme de décroissance ne change pas, le taux d'analphabétisme ne sera inférieur à 5 % qu'en 2005 et représentera 2,5 % en 2020.

Graphique 1A: évolution des taux d'analphabétisme des 15 ans et plus (Brésil 1920-2000)

Source: Recensement démographique de 1920-2000 organisé par Ferraro, 2002

Parallèlement aux recensements organisés tous les dix ans, l'Institut brésilien géographique des statistiques (IBGE) effectue des sondages nationaux auprès des petits agriculteurs (PNAD). Les taux d'analphabétisme sont calculés sur la base d'auto-évaluations sur la capacité des interviewés à lire et écrire un message simple dans une langue qui leur est familière1. Dans les années 1990 et suivant une recommandation de l'UNESCO, NBGE a également commencé à recenser les taux d'analphabétisme fonctionnel en prenant comme base le nombre d'années de scolarité. Selon ce critère, 33 millions de Brésiliens de 15 ans et plus étaient analphabètes fonctionnels en 2001, ce qui représente 27,3 % de la population de ce groupe d'âge (INEP, 2003b).

Selon NBGE, une personne ne peut être considérée comme alphabète fonctionnelle que si elle a accompli au moins quatre ans de scolarisation, car le taux de rechute dans l'analphabétisme est très élevé chez les personnes n'ayant pas atteint ce niveau (IBGE, 2001b). Cependant, et comme l'observe Wagner (1999), la communauté scientifique n'a pas de preuves évidentes sur la rétention ou la perte des acquis chez les personnes ayant bénéficié d'une instruction systématique. En outre, l'UNESCO définit l'analphabétisme fonctionnel en fonction de la capacité de satisfaire la demande d'alphabétisation dans un contexte social précis (UNESCO, 1978). Mais la demande pouvant varier considérablement au sein d'un même pays, il est difficile de la faire correspondre à un niveau scolaire spécifique. Selon nous, le choix de la quatrième année de primaire comme seuil d'alphabétisme fonctionnel est par conséquent plus politique que scientifique, et a plutôt valeur d'objectif éducatif2. Une approche plus objective et plus globale de cette question demande d'une part de faire appel à des méthodes permettant de faire une évaluation directe des compétences et de l'utilisation de la lecture et de l'écriture, et d'autre part de créer une échelle de niveaux ou de types d'alphabétisme plus fiable que la dichotomie alphabète/analphabète.

Graphique 1B: évolution du nombre d'analphabeétes de 15 ans et plus (Brésil, 1920-2000)

Source: Recensement démographique de 1920-2000 organisé par Ferraro, 2002

Au Brésil, les premières études à grande échelle basées sur des tests de compétences en alphabétisation ont été réalisées dans le cadre d'évaluations des systèmes scolaires. Dans les années 1990, le ministère de l'Éducation a mis en place un système national d'évaluation de l'éducation de base (SAEB) qui vérifie périodiquement la performance des élèves dans toutes les écoles publiques et privées du pays. Le système dispose de données comparatives depuis 1995 et donne des résultats quelque peu déroutants en ce qui concerne l'alphabétisation.3 Dans l'évaluation de 2003 (INEP, 2004), seuls 4,8 % des élèves ayant achevé leur quatrième année scolaire ont eu des résultats satisfaisants; les résultats ont été très insuffisants dans 18,7 % des cas (aucune capacité de lecture), et insuffisants dans 36,7 % des cas (ne peuvent lire que des phrases simples). Dans le test d'évaluation des compétences des élèves de huitième année, 26,8 % des résultats ont été jugés insuffisants. Ces données indiquent par conséquent qu'en dépit des efforts consentis en faveur de l'extension de la scolarité, l'analphabétisme continue de se propager à travers les nouvelles générations et au sein même de l'école.

Le seul indicateur d'alphabétisme de la population adulte basé sur l'évaluation des compétences a été défini dans le cadre d'une initiative des organisations non gouvernementales, «Indice national d'alphabétisme fonctionnel» (NFLI). Pour relancer le débat et encourager l'engagement public en faveur de l'alphabétisation, le NFLI divulgue depuis 2001 les résultats d'études annuelles à domicile sur des échantillons de population de 15 à 64 ans (Ribeiro, 2003; Fon-cesa, 2004). Quatre études ont été réalisées: deux sur la lecture et l'écriture, deux sur les mathématiques. Parallèlement à l'évaluation des compétences, des questionnaires détaillés ont été utilisés pour évaluer la pratique de la lecture, de l'écriture et des mathématiques dans différentes situations: à la maison, au travail, dans les pratiques religieuses, la participation communautaire et la formation continue. Le NFLI a une approche globale de l'alphabétisation qu'il définit ainsi:

«tes compétences nécessaires à la langue écrite et au calcul, et la manière dont elles sont utilisées dans les pratiques sociales, par les individus, les groupes sociaux et les sociétés, ainsi que l'importance accordée par ces individus et ces groupes au développement de ces compétences» (Batista et Ribeiro 2005, p. 3).

Selon les tests réalisés par le NFLI en 2003 (Instituto Paulo Monténégro & Açâo Educativa, 2003), 8 % des Brésiliens de 15 à 64 ans sont totalement analphabètes et 30 % ne possèdent que des rudiments d'alphabétisation, c'est-à-dire qu'ils sont seulement capables de repérer des informations simples dans des textes d'une ou deux phrases. Ce groupe utilise la lecture et l'écriture de manière très restreinte et généralement dans le cadre des pratiques religieuses. 37 % sont capables de repérer des informations dans des textes courts, et seuls 25 % maîtrisent parfaitement les compétences testées (repèrent l'information, comparent des textes, utilisent des informations dans les textes, etc.). Les tests du NFLI réalisés en 2004 sur les compétences en mathématiques (Instituto Paulo Monténégro & Açâo Educativa, 2004), confirment que la proportion de personnes ne sachant pas lire les chiffres est plus petite (seuls 3 %); par contre, seuls 29 % ne lisent que les chiffres qu'ils utilisent dans la vie quotidienne (numéros de téléphone, prix etc.), 46 % sont capables de résoudre des opérations simples, et seuls 23 % peuvent résoudre des problèmes demandant plus d'une opération (calcul d'un pourcentage de remise p. ex.), et interpréter des graphiques et des cartes simples.

Les données du NFLI suggèrent que s'il faut absolument fixer un critère d'alphabétisation fonctionnelle en se basant sur le niveau scolaire, il vaudrait mieux choisir huit et non quatre ans d'école, puisqu'au sein de la population ayant au moins huit ans d'école, la proportion des personnes qui maîtrisent les compétences de base en alphabétisation est supérieure à 80 % (Batista e Ribeiro, 2005). En outre, il est politiquement plus facile de justifier le seuil de la huitième année puisque que c'est le niveau de scolarisation garanti par la Constitution à tous les citoyens. Les réseaux d'organisations qui s'engagent en faveur des droits à l'éducation au Brésil privilégient ce critère et ont demandé aux autorités publiques d'ouvrir l'école primaire aux adultes qui n'y ont pas eu accès en temps voulu. Les réseaux principaux sont les Forums d'éducation des jeunes et des adultes et la Campagne nationale pour le droit à l'éducation, qui rassemble les ONG, les syndicats d'enseignants, les mouvements sociaux et les autorités éducatives locales.

Répartition de l'analphabétisme

Selon le recensement de 2000, 51,3 % du total des analphabètes sont des femmes et 66,4 % ont plus de 39 ans. Le tableau 1 montre que le taux d'analphabétisme des jeunes décroît du fait qu'ils ont pu profiter de la récente extension des prestations scolaires. Le tableau 1 montre également que le faible taux d'analphabétisme des jeunes est encore plus prononcé chez les femmes. Ceci est le résultat d'un processus entamé au milieu du siècle dernier, lorsque les femmes ont commencé à rattraper leur retard éducatif en réussissant, dans les années 1980, à dépasser la durée moyenne de scolarisation des hommes. Aujourd'hui, la majorité des personnes inscrites dans l'enseignement régulier sont des femmes. Il y a plusieurs hypothèses à cette tendance: besoins et possibilités d'investir plus pour être plus compétitives sur un marché du travail qui les désavantage, plus grande disposition - sociale - des femmes à s'adapter à la culture scolaire. Dans tous les cas, cette situation ne résulte pas d'une politique éducative spécifique, mais plutôt d'un large mouvement social en faveur de l'émancipation des femmes et de l'égalité entre les sexes.

Les autres facteurs influant sur la répartition inégale de l'alphabétisme sont directement liés aux inégalités extrêmes qui prévalent dans la distribution des richesses, si caractéristiques du Brésil. Dans le Nord-Est, région la plus pauvre, le taux d'analphabétisme était de 24,9 % en 2000, et de 7,2 % dans le Sud-Est, principal centre économique (IBGE, 2003).4 Dans les zones urbaines, le taux était de 9,5 % par rapport à 28,3 % dans les zones rurales. Étant donné la concentration de la population, les taux faibles peuvent concerner des groupes plus grands. Avec un taux inférieur à 5 % p. ex., Sâo Paulo est la ville qui compte le plus grand nombre d'analphabètes, soit 383000 personnes (INEP, 2003b). En tout cas, il est indéniable qu'il est plus difficile de lutter contre l'analphabétisme dans les régions pauvres. Les graphiques 2A et 2B donnent une vue d'ensemble de la répartition régionale de l'analphabétisme dans le pays, et confirment à quel point la situation peut paraître différente selon qu'on se base sur des taux ou des chiffres absolus.

Tableau 1: analphabètes de 15 ans et plus par groupe d'âge et sexe (Brésil: 2000)

Groupe d'âge Total Hommes Femmes
  N % N % N %
15 à 17 ans 432005 4,03 287005 5,32 145000 2,72
18 à 24 ans 1330327 5,69 837329 7,17 492998 4,22
25 à 29 ans 1040647 7,25 618652 9,08 421994 6,00
30 à 34 ans 1197781 9,19 670639 10,54 527142 7,91
35 à 39 ans 1252178 10,21 668772 11,23 583406 9,25
40 à 49 ans 2530022 13,13 1211179 12,98 1318843 13,26
50 à 59 ans 2712735 21,68 1195679 19,93 1517056 23,29
60 à 69 ans 2445134 29,85 1021698 26,98 1423437 32,32
70 ans et plus 2526433 39,80 1015297 37,05 1511136 41,89
Total 15467262 12,94 7526250 12,96 7941012 12,91

* Sans tenir compte des personnes qui n 'ont pas mentionné leur âge. Source: IBGE, Recencement démographique 2000 (IBGE, 2003).

La composition ethno-raciale de la population brésilienne, soit 53,6 % de Blancs, 45,3 % de descendants d'Africains (Noirs et Mulâtres), 0,6 % d'Orientaux et 0,5 % d'Indigènes, fait également apparaître des disparités étroitement liées aux inégalités d'accès à la richesse. Au sein de la population analphabète, le groupe le plus nombreux est constitué par les descendants d'Africains (62,9 %) et les Indigènes (0,8 %), les Blancs et les Orientaux étant moins nombreux avec respectivement 35,3 % et 0,2 % (IBGE, 2003). Le taux d'analphabétisme le plus élevé est recensé chez les Indigènes (30,2 %), suivis des Noirs (23,2 %), des Mulâtres (21,1 %), des Blancs (10,9 %) et des Orientaux (6,6 %).

Graphique 2A: taux d'analphabétisme des 15 ans et plus, Brésil (2000)

* Sans tenir compte des personnes qui n'ont pas mentionné leur âge Source: IBGE, Recensement démographique 2000 (IBGE, 2003).

En ce qui concerne les descendants d'Africains et les Blancs, qui sont les deux groupes majoritaires, on remarque la présence d'inégalités au niveau des connaissances et de la durée moyenne de scolarisation. Selon les données du SAEB, les capacités des enfants de descendants d'Africains évaluées dans les tests d'alphabétisation sont inférieures à celles des enfants blancs à niveau d'éducation égal des parents (Araûjo & Luzio, 2003). Une étude réalisée par Henriques (2001) révèle ceci: bien que la durée moyenne de scolarisation ait sans cesse augmenté au cours du 20e siècle, les inégalités ont persisté au travers des générations: les jeunes descendants d'Africains nés en 1974 ont 2,3 années de scolarisation de moins que les jeunes blancs nés la même année, et l'écart est le même pour leurs parents et grands-parents. L'auteur de l'étude conclut par conséquent que les discriminations persistent encore au sein de notre société.

Au cours des dernières années, le Brésil a entrepris un certain nombre d'initiatives contre les inégalités ethno-raciales en matière d'éducation. Certaines universités publiques réservent un certain nombre de postes aux descendants d'Africains, ce qui pourrait avoir un effet motivant sur ce groupe d'élèves au niveau du primaire. Une loi adoptée par le Congrès national en 2004 oblige à inclure des contenus d'histoire et de culture afro-brésiliennes dans les programmes d'enseignement primaire, ce qui ne manquera pas de renforcer le sentiment d'appartenance de ce groupe à la culture scolaire.

Graphique 2B: analphabètes de 15 ans et plus, Brésil (2000)

* Sans tenir compte des personnes qui n 'ont pas mentionné leur âge. Source: IBGE, Recensement démographique 2000 (IBGE, 2003).

Alphabétisation et formation des adultes

Le système éducatif brésilien est très décentralisé. L'éducation de base relève de la responsabilité des 26 États et des plus de 5000 municipalités de la fédération. Le gouvernement fédéral a la responsabilité de coordonner, d'évaluer et de promouvoir l'égalité. Les écoles privées participent également au système, mais près de 90 % des élèves inscrits dans le système d'éducation de base étudient dans des écoles publiques gratuites.

Juridiquement parlant, le système éducatif brésilien considère la formation des adultes comme une forme particulière d'enseignement plus flexible en termes de volume de travail, de programmes d'enseignement, de formes d'évaluation et d'enseignement à distance. Au niveau du primaire, ce système s'adresse aux jeunes de 14 ans et plus. Ce type d'enseignement, qui s'appelle actuellement Formation des jeunes et des adultes (YAE), est généralement dispensé dans le cadre des systèmes scolaires des municipalités et des États, et par les enseignants de l'enseignement régulier. En outre, certains gouvernements des États et des municipalités, le gouvernement fédéral et les organisations de la société civile organisent des formations d'adultes extrascolaires dispensées par des formateurs non professionnels.

Les inscriptions à la Formation des jeunes et des adultes (YAE) sont prises en compte dans le recensement scolaire réalisé chaque année par le ministère de l'Éducation, qui rassemble les informations fournies par les écoles reconnues dans l'ensemble du pays. Cependant, le recensement scolaire ne tient pas compte des programmes d'alphabétisation extrascolaires, si bien que la meilleure source de données sur la participation à ce type de programme est la PNAD (enquête nationale officielle auprès des ménages). La PNAD collecte toutes les informations fournies par les chefs de famille sur la fréquentation scolaire ou la participation à des formations d'adultes de tous les membres de leur foyer pendant la réalisation de l'étude.

Selon la PNAD, le nombre de participants à des formations d'adultes a augmenté au cours de la dernière décennie, plus particulièrement à partir de 1996 puis en 2003, date à laquelle le gouvernement fédéral a entrepris des initiatives dans ce domaine (graphique 3). En 2003, 786000 personnes ont participé à des cours d'alphabétisation pour adultes, ce qui représente 5,3 % des personnes s'étant déclaré illettrées la même année (14,6 millions); 72 % des participants vivaient dans des zones urbaines et 59 % dans le nord, 63 % étant des femmes, 71 % des descendants d'Africains et 71 % ayant plus de 35 ans (SECAD/MEC 2005).

Graphique 3: participants à des formations d'adultes (Brésil 1992-2003)

Source: PNAD 1992-2003, organisée par le SECADI MEC 2005

Selon le recensement scolaire, les inscriptions à la Formation des jeunes et des adultes dans l'enseignement primaire (YAE) ont également augmenté pendant les dernières années et sont passées de 2,0 millions en 1998 à 3,4 millions en 2004. Pendant cette période, on a constaté une forte augmentation du rôle des municipalités dans ce domaine: en 1998, la part des systèmes scolaires municipaux a représenté 30,2 % du total des inscriptions, et 58,1 % en 2004 (tableau 2). La décentralisation est plus généralisée dans le primaire et résulte des réformes éducatives réalisées depuis les années 1990 (Die Pierro, 2001).

Tableau 2: évolution des premières inscriptions à la Formation des jeunes et des adultes dans l'enseignement primaire (Brésil, 1995-2004)

Année Total Fédération Etats Municipalités Privé
    N % N % N % N %
1998 2081710 561 0.2 1316533 63.2 629659 30.2 134957 6.5
2001 2636888 4885 0.2 1238989 47.0 1267740 48.1 125274 4.8
2002 2788113 2733 0.1 1098825 39.4 1587905 57.0 98650 3.5
2003 3315887 909 0.0 1387505 41.8 1846964 55.7 80509 2.4
2004 3419170 381 0.1 1354303 39.6 1987723 58.1 76763 2.2

Source: Recensement scolaire 1998-2004 (INEP, 1999, 2003 and 2005)

Bien que la loi prévoie des formations spécifiques pour les jeunes et les adultes, un nombre considérable de plus de 15 ans sont inscrits dans l'enseignement régulier, même si théoriquement ce dernier est réservé aux jeunes de 7 à 14 ans. Mis à part le problème des jeunes qui ont besoin de plus de temps que prévu pour terminer le cycle d'enseignement primaire, de plus en plus de personnes plus âgées ont été recensées dans l'enseignement régulier. Cette distorsion est due aux mécanismes qui régulent le financement de l'éducation au Brésil et qui, comme nous l'expliquerons plus loin, n'encouragent ni les États ni les municipalités à organiser des formations spécifiques pour les jeunes et les adultes. Étant donné cette distorsion, si nous voulons évaluer la couverture de la demande éducative des jeunes et des adultes, nous devons tenir compte des inscriptions à la fois aux formations YAE et dans l'enseignement régulier. Le tableau 3 compare le nombre d'inscriptions aux formations YAE et d'élèves de plus de 14 ans inscrits dans l'enseignement régulier, avec le nombre de jeunes et d'adultes qui avaient moins de huit années d'école en 2000. Cette comparaison donne une idée de l'écart entre les offres éducatives d'une part, la demande des jeunes et des adultes et les objectifs de notre Plan éducatif national d'autre part.

Tableau 3: population de 15 ans et plus par niveau de scolarisation, et inscriptions aux formations des jeunes et des adultes, et dans l'enseignement régulier (Brésil, 2000)

15 ans et plus (A) Inscriptions des 15 ans et plus B+ C/A

%

Formation des jeunes et des adultes (B) Enseignement régulier (C)
Niveau scolaire Age groups ns 1reà4e année 5e à 8e année 1reà4e année 5e à 8e année  
Non scolarisés à 3e année 15 à 24 ans 5347268 394091 - 1419148 - 33.9
25 ans et plus 27873991 403210 - 330902 - 2.6
4e à 7e année 15 à 24 ans 11621139 - 821276 - 6176694 60.2
25 ans et plus 25949005 - 572084 - 457257 4.0
TOTAL   70791403 797301 1393360 1750050 6633951 14.9

Sources: pour (A), Recensement démographique 2000 (IBGE, 2003) et pour (B) et (C) Recensement scolaire 2000 (INEP. 2005)

Programmes d'alphabétisation: les partenariats

Au cours du 20e siècle, alors que les systèmes réguliers d'éducation de base commençaient à s'organiser et à s'épanouir, l'éducation des adultes est devenue la cible d'initiatives diverses qui se concrétisaient généralement par des campagnes proposant des cours de courte durée et faisant appel à des alphabétiseurs non professionnels. Les plus importantes sont les campagnes nationales initiées entre 1947 et 1950, avec 830 000 participants en 1950 (Beisiegel, 1974), et le Mouvement brésilien d'alphabétisation, Mobral, avec 7,3 millions de participants entre 1970 et 1972 (Corrêa, 1973). Même si ces campagnes n'ont pas eu d'effets significatifs sur l'amélioration des taux d'alphabétisation au Brésil, elles ont très certainement contribué à organiser graduellement le système de Formation des jeunes et des adultes (YAE), à la fois en stimulant la demande éducative de ce segment de population et en obligeant les autorités locales à dispenser ce type de formations. Même s'il est très loin de satisfaire la demande, le système de YAE a permis à de nombreux adultes d'améliorer leur niveau scolaire.

À présent, l'efficacité des cours d'alphabétisation de courte durée est remise en question, notamment pour les apprenants issus de milieux pratiquement illettrés. L'enseignement régulier reconnaît lui-même que l'alphabétisation est un processus long, et c'est la raison pour laquelle de nombreux systèmes scolaires prévoient des cycles de deux à trois ans pour l'acquisition de bases d'alphabétisation.5 La majorité des éducateurs d'adultes confirment aussi que les programmes de courte durée ne suffisent pas pour garantir l'acquisition d'un minimum de connaissances. Les statistiques fournissent de solides indicateurs dans ce domaine: selon les enquêtes auprès des ménages (PNAD) réalisées entre 1992 et 2002, parmi les personnes qui déclarent que leur plus haut niveau éducatif jamais atteint est un programme d'alphabétisation pour adultes, près de 60 % d'entre elles se disent illettrées (Henriques, 2005). Le NFLI montre également que parmi les adultes n'ayant qu'une à trois années de scolarisation, 32 % n'ont même pas acquis les rudiments.

En dépit de tout cela, les initiatives que l'on qualifie de campagnes d'alphabétisation n'ont pas perdu leur attrait politique. Les gouvernements continuent probablement de considérer que les initiatives à court terme sont le meilleur moyen de prouver leur bonne volonté, de mobiliser la société ou d'atteindre un plus grand nombre de gens en un temps plus court, alors que garantir l'éducation de base pour tous reviendrait plus cher et donne des résultats plus graduels et à plus long terme. On relève néanmoins deux éléments novateurs dans les politiques d'alphabétisation des années 1990: d'une part le choix d'approches basées sur l'engagement des partenaires locaux gouvernementaux et non gouvernementaux, et d'autre part, la reconnaissance, du moins sur le plan formel, que les efforts consentis pour enseigner la lecture et l'écriture aux jeunes et aux adultes doivent être complétés par des offres de formation continue.

Au début des années 1990, une initiative de la ville de Sâo Paulo a eu des répercussions au niveau national. Le célèbre éducateur brésilien Paulo Freire était devenu secrétaire à l'Enseignement dans cette ville. Après avoir mis à jour les principes et la méthodologie éducatifs qui l'avaient rendu célèbre, Paulo Freire a lancé un mouvement d'alphabétisation, le MOVA, basé sur l'établissement de partenariats avec les organisations communautaires. Ces dernières étaient chargées de mobiliser des apprenants et des formateurs, et de fournir des locaux pour les cours. Les autorités municipales, quant à elles, devaient se charger des appointements des formateurs et superviser l'évolution des groupes, qui se rencontraient deux heures par jour et quatre fois par semaine. Les formateurs se réunissaient une fois par semaine avec des superviseurs pédagogiques pour planifier leur travail. Aucune durée d'apprentissage n'était fixée, et ceux qui se sentaient prêts pouvaient continuer leurs études dans le cadre du système municipal de formation des jeunes et des adultes, YAE. En 1992,18 000 jeunes et adultes ont participé au programme en partenariat avec 73 organisations communautaires (Pontual, 1995). Des changements dans le gouvernement municipal ont contraint d'interrompre le programme à cette date, mais il a pu reprendre en 2001. En 2004, 32 000 jeunes et adultes ont participé au programme en partenariat avec 160 organisations de la société civile.

Le modèle MOVA a été repris par d'autres villes sous d'autres formes et avec la participation de partenaires nouveaux (syndicats, entreprises), sans cesser de s'inspirer de la méthode freirienne (MOVA, 2004). En 2003, un organisme national de promotion de rencontres annuelles - MOVA Brazil - a réuni des managers de cinq États et de 20 villes de toutes les régions (Di Pierro e Graciano, 2003). De nombreux MOVA ont produit des matériels et recensé les expériences, mais n'ont malheureusement pas fourni d'informations systématisées sur les résultats d'apprentissage, les impacts sur les conditions de vie des apprenants ni le nombre d'apprenants qui ont poursuivi leurs études dans le cadre des formations YAE.

En 1996, le gouvernement fédéral a pris une importante initiative en faveur de l'alphabétisation des adultes avec le programme Alfabetizaçâo Solidâria (PAS) géré par un organe spécialement créé pour coordonner les politiques de lutte contre la pauvreté. L'approche choisie par le PAS se basait elle aussi sur les partenariats et privilégiait la participation des gouvernements municipaux, des entreprises et des institutions d'enseignement supérieur (HEI). Au début, le programme était limité aux régions pauvres du nord et du nord-est, mais il s'est étendu plus tard aux grands centres urbains des autres régions. À la différence du modèle MOVA, le PAS est organisé en modules de six mois, le premier étant consacré à la planification et à la formation des formateurs, les autres à l'alphabétisation proprement dite, avec un total de 240 heures. En principe, chaque apprenant et chaque formateur ne peut participer qu'à un seul module; au semestre suivant, on constitue de nouveaux groupes et on forme d'autres formateurs. Les HEI coordonnent la mobilisation des municipalités et assurent les formations et la supervision pédagogique des formateurs qu'ils sélectionnent au sein de la population locale. Les autorités municipales se chargent de convoquer les participants et d'indiquer les locaux où les groupes peuvent travailler.

En 1998, le PAS était une organisation non gouvernementale au sens juridique du terme et s'appelait Alfabetizaçâo Solidâria, mais continuait à recevoir la majorité de ses ressources du gouvernement fédéral. Il a également commencé à signer des accords avec les gouvernements des États et à organiser des campagnes pour convoquer les donateurs individuels et faire de la publicité dans les médias avec le soutien d'artistes et de personnes célèbres. Jusqu'en 2002, cette organisation non gouvernementale a consacré une part importante de fonds fédéraux à la formation des jeunes et des adultes, YAE. Selon l'organisation, 4,9 millions d'étudiants ont participé au programme de 1997 à 2004 dans 2050 municipalités, en partenariat avec 144 entreprises et 209 H El. Les coûts par étudiant se montaient à 168000 reals (61,70 dollars US)6 et les ressources ont servi à subventionner les formateurs et les coordinateurs locaux, les repas et les manuels des élèves, la formation et l'évaluation (Alfabetizaçâo Solidâria, 2004).

En 2003, les nouveaux gestionnaires nommés par le gouvernement fédéral ont décidé, dès le début de leur mandat, de reprendre la direction des initiatives dans ce domaine, et ont lancé le Programme d'alphabétisation du Brésil (PBA) pour éradiquer l'analphabétisme en quatre ans, c'est-à-dire à un rythme plus rapide que l'ancien Plan éducatif national. Par le biais d'accords, le PBA donne un soutien financier aux organismes gouvernementaux et non gouvernementaux qui ont déjà une certaine expérience en alphabétisation des adultes, ce qui leur permet d'étendre leurs activités. En 2003, le gouvernement fédéral a accordé 175,5 millions de reals (59,9 millions de dollars US) aux signataires de l'accord, une partie fixée à 15,00 reals (5,12 dollars US) par mois et par apprenant étant réservée aux salaires des formateurs pendant six mois, et 80,00 reals (27,32 dollars US) à leur formation. Les organisations signataires avaient la liberté d'utiliser le reste des ressources en fonction de leurs besoins, de leurs critères et de leurs possibilités. Cette même année, le programme a touché 1,96 million d'apprenants.

En 2004, le ministère de l'Éducation a été restructuré et le Programme d'alphabétisation du Brésil (PBA) transféré dans un nouveau secrétariat spécialement mis en place pour promouvoir la formation continue, l'alphabétisation et la diversité (SECAD). L'objectif principal étant de combattre l'exclusion et les inégalités, le SECAD a commencé à coordonner les activités d'alphabétisation et de formation d'adultes en les intégrant aux programmes d'éducation rurale, d'éducation à l'environnement, d'éducation des populations indigènes et de diversité ethno-raciale.

Le PBA a subi un certain nombre de changements au cours de l'année: la durée maximum de l'alphabétisation est passée de six à huit mois et, pour ne pas décourager la formation de petits groupes nécessaire pour répondre à la demande dans les zones rurales et les bidonvilles, un nouveau critère a été utilisé pour calculer le salaire des formateurs: un salaire de base de 120,00 reals (44,07 dollars US), plus 7,00 reals (2,57 dollars US) par mois et par élève. Les coûts de formation par formateur, soit 120,00 reals (44,07 dollars US), plus les coûts entraînés pour optimiser les résultats, ont provoqué un léger recul du nombre de participants au programme en 2004, soit 1,81 million, le montant total de l'investissement du gouvernement fédéral représentant 168 millions de reals (61,7 millions de dollars US). Nous ne disposons pas de données permettant d'évaluer les montants investis par les autres partenaires du PBA, mais si l'on ne considère que l'investissement du gouvernement fédéral, le coût maximum par élève, pour une classe de 20 élèves était de 94,00 reals (32,10 dollars US) en 2003 et de 110,00 reals (40,40 dollars US) en 2004.

En 2004, le PBA a augmenté la part de participation des gouvernements des États et des municipalités dans les partenariats, si bien que les ONG n'étaient plus en majorité (graphique 4). On remarquera qu'en 2004, la prise en charge de 55,9 % des participants dans le secteur non gouvernemental était gérée par seulement trois ONG: Alfabetizaçâo Solidâria, SESI - Service social de l'industrie - et la filiale brésilienne ti'Alfalit, organisation chrétienne internationale. Pour 2005, la direction du PBA a prévu de décentraliser le programme et de renforcer la participation et l'autonomie des gouvernements infranationaux.

Graphique 5: répartition des participants au Programme d'alphabétisation du Brésil en fonction du type d'organisme signataire (2003-2004)

Source: Henriques (2005)

La création du SECAD a favorisé l'intégration des politiques d'alphabétisation et de formation des jeunes et des adultes. Pour répondre à la demande de formations continues générée par le PBA, le SECAD a investi, en 2004, 420 millions de reals (154,41 millions de dollars US) en accord avec les États et les municipalités, dans le but de renforcer et d'étendre les réseaux de formation des jeunes et des adultes, YAE.

Les expériences du MOVA, 6'Alfabetizaçâo Solidâria et du PBA montrent que le partenariat est le modèle favori de stratégie de lutte contre l'analphabétisme dans un pays aussi vaste que le Brésil. D'un autre côté, cet ample concept de partenariat masque les divergences d'opinions sur les questions de responsabilité publique, de centralisation ou de décentralisation. En premier lieu, puisque l'analphabétisme touche plus les couches sociales défavorisées et les régions pauvres, il est fondamental que les autorités publiques et le gouvernement central investissent suffisamment pour pouvoir pallier le manque de ressources des régions pauvres. Les autorités publiques infranationales ou locales, à leur tour, ont plus de facilité à mettre en œuvre des actions spécifiques en fonction des environnement respectifs. Même s'ils ont souvent besoin d'aide, il est important que les gouvernements locaux participent à la gestion du programme d'alphabétisation et se dotent de structures de formation continue. Il va sans dire que la participation de la société civile est la bienvenue, à la fois parce qu'elle complète les efforts de l'État, et parce qu'elle encourage la participation et le contrôle des politiques publiques par la société civile. Les exemples que nous venons de décrire démontrent que les grands programmes nationaux ont tendance à privilégier les grandes organisations en coopération avec les entreprises et les églises. Si l'alphabétisation est considérée comme un moyen d'autonomiser les groupes sociaux défavorisés, il faut aussi renforcer la participation et l'autonomisation des organisations communautaires. La comparaison entre le modèle MOVA et le PBA montre que les organisations communautaires ont plus d'opportunités lorsque les programmes sont gérés par les gouvernements locaux.

Une étude récemment effectuée au Brésil confirme que depuis les années 1990, le nombre d'ONG déclarées, et plus particulièrement celles axées sur le développement et la défense des droits, a augmenté substantiellement (IBGE, 2004). Le pays dispose également de ressources sociales très précieuses qu'il ne faut pas gâcher. Cependant, l'autonomisation effective des organisations de la société civile dépend de la capacité des gouvernements à garantir la reddition de comptes concernant les résultats des partenariats impliqués dans des transferts de fonds. Les gouvernements ne peuvent pas se contenter d'allouer des ressources sans diriger ni évaluer les politiques publiques.

L'évaluation, principal obstacle à l'amélioration des politiques et des pratiques

Dans les années 1990, des études sur la psychogénèse de l'écriture (Ferreiro, 1986) et des recherches sur l'alphabétisation dans une perspective sociale (Street, 1984; Soares 1998) ont critiqué les pratiques scolaires d'alphabétisation, essentiellement basées sur les méthodes d'identification et d'association de graphèmes et de phonèmes. Des approches valorisant le diagnostic et l'extension des préacquis des élèves, et formulant des hypothèses sur le système d'écriture, ont émergé. On a également commencé à privilégier l'utilisation de textes de genres différents donnant des témoignages vivants et des réflexions sur l'usage social de l'écriture. Ces initiatives sont venues s'ajouter à certains principes de l'éducation populaire freirienne qui, depuis les années 1960, considérait l'alphabétisation comme un moyen pour les adultes de prendre conscience des problèmes sociaux et de s'engager à les maîtriser. Parallèlement, les approches traditionnelles d'alphabétisation ont été revues.

Aujourd'hui, certains programmes utilisent des approches méthodologiques spécifiques, d'autres non; certains travaillent avec des manuels scolaires, d'autres les remplacent par des matériels produits par les formateurs mêmes. Cependant, bien que les principes et les guides méthodologiques soient définis dans les programmes d'alphabétisation, il est très difficile de savoir si oui ou non ils sont appliqués et utilisés en pratique. Les débats passionnés sur les meilleures méthodes, le temps nécessaire à l'alphabétisation initiale ou son impact individuel ou social, manquent de preuves empiriques suffisamment valables pour déboucher sur un consensus ou des prises de décision. Les recherches universitaires sur ce thème se limitent généralement à des études de cas réalisées par des agents directement impliqués (Haddad, 2002), dont les résultats sont difficiles à généraliser même s'ils fournissent des éléments permettant de réaliser des recherches étendues à plus grande échelle. Au Brésil, l'évaluation des programmes n'en est encore qu'à ses balbutiements, et constitue l'un des principaux obstacles à l'amélioration des politiques et des pratiques d'alphabétisation.

Les expériences des programmes d'alphabétisation décrits au chapitre précédent permettent de se faire une image des étapes qui ont marqué l'ensemble du pays. En ce qui concerne le MOVA, il faut reconnaître que le manque de volonté de produire et de divulguer des résultats de recherche est un point délicat; si l'on parvient à le surmonter, le mouvement pourrait servir de modèle de politique publique d'alphabétisation.

Alfabetizaçâo Solidâria a fait certains efforts dans ce domaine en proposant, depuis sa création, un système d'évaluation qui enregistre à chaque module, le niveau initial et final de connaissances de chaque participant, les critères étant les suivants: connaissance de l'alphabet; capacité de lire ou d'écrire des mots, des phrases et des textes simples. À partir de 2000, l'association a également évalué les compétences en expression orale et en mathématiques. L'information est donnée par les formateurs, puis collectée et analysée par les HEI et le programme de coordination qui publie un rapport périodique. Ceci a permis de constater que les participants possédaient déjà un certain nombre de connaissances à différents niveaux, qu'ils ont progressé ensuite au fur et à mesure de la formation, mais qu'à la fin des formations de 1998 et 2000, seule une minorité (18 % à 25 %) savait lire et écrire des textes courts (Programme Alfabetizaçâo Solidâria, 1999; Klein, 2000 et Janeiro, 2002). Vu les résultats, Alfabetizaçâo Solidâria estime que son objectif majeur est d'inciter les jeunes et les adultes à apprendre, et d'encourager les municipalités à proposer des formations continues. Se référant à des études complémentaires, l'association a relevé plusieurs indicateurs de résultats du programme, notamment: recul des indicateurs d'analphabétisme dans les municipalités concernées, accroissement des offres de formation de jeunes et d'adultes, et participation accrue aux activités communautaires (Janeiro, 2002). L'évaluation indépendante réalisée par la Cour fiscale fédérale n'est cependant pas aussi optimiste et estime que le programme ne sera pas capable de garantir la continuité des formations; elle suggère d'allonger la durée de l'alphabétisation, ce qui permettrait d'employer un plus grand nombre de formateurs déjà formés, d'utiliser les matériels didactiques et d'éviter les inscriptions répétées (Tribunal de Contas da Uniâo, 2002). Car même si ce n'est pas autorisé, de nombreux apprenants se réinscrivent et faussent alors les données sur le nombre de bénéficiaires.

Depuis ses débuts, le PBA a enregistré tous ses participants. Les données personnelles des apprenants sont collectées par les organisations signataires et rassemblées par le gouvernement fédéral sur une plateforme informatique. Cette procédure permet de contrôler les doubles inscriptions et sert de base au suivi des participants qui terminent la formation, tout en permettant de s'interconnecter avec d'autres programmes sociaux. En 2004, le PBA a élaboré un projet d'évaluation qui prend en compte divers aspects politiques. Le projet prévoit une collecte de données permettant de mesurer dans quelle mesure les fonds investis dans le programme complètent, stimulent ou remplacent les investissements à d'autres niveaux gouvernementaux et non gouvernementaux. À cet effet, toutes les formations d'adultes dispensées dans le pays ont été consignées. Le plan d'évaluation essaie d'utiliser des méthodologies scientifiquement reconnues pour identifier les résultats et les impacts à long terme, tout en mesurant la part d'impact du programme sur les changements constatés. Le plan essaie aussi de collecter des éléments sur les meilleures stratégies politiques et pédagogiques axées sur l'optimisation des résultats. À ces fins, des instruments standardisés sont actuellement élaborés, qui vont permettre de faire une évaluation cognitive d'échantillons d'apprenants en début et en fin de formation, en plus des questionnaires utilisés pendant et après la formation. Des informations vont également être collectées auprès de groupes de non-participants, et il sera vraisemblablement possible de former des groupes aléatoires pour le traitement et le contrôle des données.

Le plan est ambitieux et constituera un pas décisif, même s'il n'est réalisé que partiellement. Il est regrettable que les premières étapes de sa mise en œuvre n'aient été réalisées qu'au début 2005, soit deux ans après son lancement, après que plus de trois millions de personnes aient déjà participé et que plus de 300 millions de reals aient été investis. Peut-être des projets plus pragmatiques fournissant des informations immédiates et pouvant être complétés graduellement répondraient-ils mieux au besoin urgent d'évaluer les politiques publiques du Brésil.

Le financement de l'alphabétisation pour tous

À la fin des années 1990, les dépenses publiques dans le secteur éducatif au Brésil représentaient 4,3 % du PIB, soit un taux comparable à celui de pays comme l'Argentine, le Chili et le Paraguay. Cependant, la valeur du PIB brésilien par tête est nettement inférieur et les coûts par élève dans le système d'enseignement primaire, en 1999, représentaient moins de la moitié de ceux de l'Argentine ou du Chili (INEP, 2003a). En approuvant le Plan éducatif national en 2001, le pouvoir législatif avait inclut un article prévoyant une augmentation progressive des dépenses publiques dans le secteur éducatif, de façon à représenter 7 % du PIB d'ici 2011. Malheureusement, un veto présidentiel a interdit l'article, si bien que le Plan actuellement en vigueur ne prévoit aucune source de financement susceptible de garantir la réalisation de ses objectifs, ce qui compromet sa cohérence politique.

L'alphabétisation des adultes et les formations des jeunes et des adultes, YAE, sont particulièrement touchées par le manque d'argent. L'aide internationale dans ce domaine est pratiquement inexistante au Brésil. Certaines données de 1995 indiquent que les formations YAE reçoivent 1,4 % des dépenses publiques réservées au secteur éducatif aux trois niveaux gouvernementaux (Abrahâo e Fernandez, 1999). Selon la même source, la part des dépenses du gouvernement fédéral dans la formation des jeunes et des adultes a été de 9,2 % cette même année, alors que celle des États et des municipalités était respectivement de 62,3 %et28,4 %. Aucune donnée ne nous permet d'estimer le montant des fonds publics investis plus récemment dans la formation des jeunes et des adultes, problème supplémentaire qui vient s'ajouter au manque pratiquement total d'informations sur la part des investissements non gouvernementaux dans ce secteur.

En 1996, le Brésil a pourtant mis en place un système de distribution de fonds publics en faveur de l'enseignement primaire, qui limitait les investissements des États et des municipalités, principaux prestataires de services dans ce domaine, à la formation des jeunes et des adultes, YAE. Il s'agit du Fonds de développement de l'enseignement élémentaire et de la valorisation des enseignants (FUNDEF), mécanisme qui propose de sauvegarder l'investissement dans le secteur de l'enseignement primaire et de réduire les disparités entre les services éducatifs des États et des municipalités selon qu'elles sont plus pauvres ou plus riches. Les États et les municipalités sont obligés d'affecter une part plus importante des ressources réservées à l'éducation dans des fonds publics, qui sont redistribués plus tard en fonction du nombre d'inscriptions qu'ils enregistrent en classes de primaire. Le gouvernement fédéral complète les fonds des États qui n'ont pas de moyens suffisants pour pouvoir payer la contribution minimum par étudiant prévue par la loi. Dans la formulation du FUNDEF approuvée à l'origine par le Congrès national, la formation des jeunes et des adultes pouvait se voir allouer des ressources provenant de ce fonds, mais le veto l'a bloquée: ce revirement a dissuadé les États et les municipalités d'investir dans l'éducation des adultes, et explique en partie pourquoi, dans les États pauvres qui reçoivent des fonds supplémentaires du FUNDEF, le nombre d'élèves de plus de 14 ans inscrits dans le système d'enseignement régulier est si élevé.

Pour tenter de pallier cette situation, le gouvernement fédéral a mis en place depuis 2001, un programme qui permet de transférer des fonds aux 14 États les plus pauvres du nord et du nord-est et à 398 municipalités présentant un faible taux d'IDH. Les États et municipalités en question reçoivent des montants proportionnés au nombre d'inscriptions qu'ils enregistrent dans le secteur de la formation des jeunes et des adultes, YAE. Ce programme a fait augmenter de plus de 500 % le budget fédéral affecté à ce type de formation et encouragé l'expansion des offres de formations pour les jeunes et les adultes dans ces régions, mais reste encore largement insuffisant pour répondre à la demande.

Depuis 2003, le ministère de l'Éducation a négocié avec les gouvernements des États et les municipalités la création d'un fonds (FUNDEB, Fonds de développement de l'éducation de base), pour tous les niveaux de l'éducation de base et pour la formation des jeunes et des adultes. La Campagne nationale pour le droit à l'éducation enjoint de déterminer le montant minimum par élève en fonction des besoins réels à chaque niveau et pour chaque type d'éducation. Il est donc fondamental d'accroître le volume total des fonds publics réservés à l'éducation.

L'opposition du pouvoir exécutif aux efforts entrepris pour augmenter l'investissement public dans l'éducation est la conséquence des politiques économiques adoptées par les derniers gouvernements fédéraux. Suivant la recommandation du FMI, le pays a généré annuellement un surplus supérieur à 4% du PIB pour payer la dette publique interne et externe (pourcentage égal à celui dépensé annuellement pour financer l'ensemble de l'enseignement public dans le pays). À moins de vérifier le caractère irrévocable de cette politique économique, il ne sera pas possible d'atteindre les objectifs éducatifs dans l'enseignement régulier, et encore moins dans la formation et l'alphabétisation des jeunes et des adultes. La Campagne nationale pour le droit à l'éducation enjoint le Congrès national d'annuler le veto présidentiel et de réintroduire dans le Plan national éducatif, l'article qui prévoit d'accroître les dépenses publiques dans le secteur de l'éducation à 7% du PIB en 2011.

Conclusion

Au cours des dernières décennies, le Brésil a fait d'importants progrès en faveur de l'alphabétisation de la population. Tous les enfants ou presque, ont accès à l'école et les chances éducatives des jeunes et des adultes sont également en hausse, bien qu'à un rythme plus lent. La décentralisation, les gouvernements locaux et les partenariats entre acteurs de la société civile donnent une dimension nouvelle aux programmes d'alphabétisation qui peuvent répondre de manière plus adéquate aux intérêts et aux besoins des communautés. Le fait que ces programmes reconnaissent que l'alphabétisation est un processus de longue haleine qui va de pair avec la scolarisation pourrait accélérer l'extension des offres de formations pour les jeunes et les adultes.

Même si les progrès sont indéniables, certains problèmes persistent. Les inégalités sociales et régionales continuent de se répercuter sur les inégalités d'accès à l'alphabétisation: c'est au sein des groupes sociaux et dans les régions les plus pauvres que sont enregistrés les plus hauts indicateurs d'analphabétisme. Il est alarmant de constater que l'analphabétisme est toujours prédominant chez les descendants d'Africains, envers lesquels le pays a une dette historique. Si les problèmes concernant le financement de la formation des jeunes et des adultes, et les déficiences de l'enseignement régulier continuent de persister, il est peu probable que le pays puissent atteindre les objectifs de son Plan éducatif national d'ici 2001. Enfin, il est indispensable de relier entre elles les politiques éducatives et les politiques axées sur la lutte contre la pauvreté et sur une distribution plus équitable des richesses si l'on veut que l'ensemble de la population tire effectivement profit de l'alphabétisation et des avantages qu'elle représente pour le développement humain et social dans tous les domaines vitaux.

Notes

1  Pendant les premières décennies du 20e siècle, le recensement considérait comme alphabétisée toute personne déclarant savoir lire et écrire; dans les années 1950, l'IBGE a donné une définition plus précise: était alphabétisée toute personne sachant lire et écrire un message simple dans une langue familière, à l'exception de celles qui ne savaient écrire que leur nom. À peu de choses près, cette définition est encore utilisée actuellement (Ferraro, 2002). Le rapport sur le recensement 2000 donne la définition suivante: «Toute personne est considérée comme alphabétisée lorsqu'elle est capable de lire et d'écrire un message simple dans une langue qui lui est familière. Les personnes qui ont appris à lire et écrire, mais ont tout oublié, et celles qui ne sont capables d'écrire que leur nom sont considérées comme analphabètes» (IBGE, 2003, p. 32). Selon Ferraro (2002), la régularité avec laquelle les taux d'analphabétisme ont régressé durant le 20e siècle font supposer que ces quelques modifications apportées dans les définitions n'ont pas substantiellement influencé la comparabilité des données.

2  C'est la raison pour laquelle les pays développés ont choisi la huitième et la neuvième année de scolarisation comme seuil d'alphabétisme fonctionnel. Soares (1992), Hillerich (1978) et Newman & Veverstock (1990) débattent du caractère arbitraire du choix qui consiste à définir l'alphabétisation sur la base d'un nombre donné d'années d'enseignement primaire.

3  Le SAEB effectue des évaluations dans les matières «mathématiques» et «portugais». Néanmoins, la dernière évaluation a concerné la lecture (à l'exception de la grammaire et de l'expression orale). Ceci a incité plusieurs auteurs (y compris les chercheurs chargés de l'évaluation) à considérer les résultats du SAEB sur les compétences en portugais comme un indicateur de niveau d'alphabétisme. Voir entre autres Bonamino, Coscarelli et Franco (2002), et INEP (2003a).

4  L'indice de développement humain (IDH) des États brésiliens divulgué par le Programme des Nations unies pour le développement et l'IPEA (PNUD & IPEA, 2003) donne une idée des disparités régionales au Brésil: l'IDH-M des sept États du nord se situe entre 0,697 (Acre) et 0,753 (Amapâ); dans les neuf États du nord-est, entre 0,636 (Maranhâ et 0,705 (Pernambuco et Rio Grande do Norte); dans les quatre États du sud-est, entre 0,765 (Espirito Santo) et 0,820 (Sâo Paulo); dans les trois États du sud, entre 0,787 (Paranâ) et 0,822 (Santa Catarina); et dans les trois États et le district fédéral du centre-ouest, entre 0,773 (Mato Grosso) et 0,844 (District).

5  Soares (1998) retrace l'histoire de l'évolution des méthodes d'alphabétisation au Brésil.

6  Les conversions en dollars US ont été calculées sur la base des taux de change moyens de l'année en question.

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