Malcolm Skilbeck

Dans sa Synthèse globale, Malcolm Skilbeck présente quelques résultats détaillés des concepts et tendances, importants pour tirer des conclusions sur le travail d’alphabétisation. Il se base pour cela sur l’analyse des différentes études, évaluations et rapports nationaux. Ce texte est extrait d’un vaste ouvrage: Éducation pour tous – Synthèse globale par Malcolm Skilbeck. EPT Forum Consultatif international. Paris: UNESCO EFA Forum.

Synthèse globale
Éducation pour tous – Bilan à l’an 2000

Résumé

La Conférence mondiale sur l’éducation pour tous, qui s’est tenue à Jomtien (Thaïlande) en 1990, a marqué un nouveau départ dans la volonté, affirmée à l’échelle mondiale, d’universaliser l’éducation de base et d’éliminer l’analphabétisme. Au travers de la Déclaration et du Cadre d’action de Jomtien, des engagements ont été pris et des directions définies pour le déploiement d’efforts soutenus et de grande ampleur. Des accords ont été passés entre pays, organisations intergouvernementales et ONG, en vue d’un travail commun, tout au long de la décennie. Le Forum sur l’éducation pour tous (EPT) a été mis sur pied pour guider et coordonner le travail, suivre les progrès et évaluer les résultats.

D’autres conférences mondiales et régionales ont renforcé le message de Jomtien tout au long des années 90, en le plaçant dans un contexte mondial de développement économique et social et de changements. Diverses entreprises, menées en collaboration, ont vu le jour, visant à contrôler les résultats de l’apprentissage, à partager connaissances et expériences et à faire progresser les objectifs de Jomtien.

Durant toute la décennie, les pays ont introduit un grand nombre de réformes éducatives, représentant directement ou en rapport avec les six objectifs spécifiques retenus à la Conférence de Jomtien. En vue du Forum mondial qui doit se tenir à Dakar en avril 2000, les progrès réalisés par les pays et les difficultés et obstacles qu’ils ont rencontrés ont été analysés dans une série de rapports nationaux, de synthèses régionales, d’études thématiques et bien d’autres documents encore. La masse d’informations recueillie est aujourd’hui synthétisée dans deux documents principaux, la présente Synthèse globale et le Document statistique. Dans ces deux documents, les analyses sont présentées en fonction des six objectifs de Jomtien.

Les pays engagés dans la poursuite des buts de Jomtien ont été invités à définir leurs propres objectifs en fonction de leurs situations et de leurs capacités d’intervention. Les types de documents préparés, les thèmes abordés et les problèmes identifiés varient donc beaucoup d’un pays à l’autre. La Déclaration de Jomtien reposait sur des valeurs et des principes fondamentaux, dont plusieurs se sont révélés extrêmement difficiles à établir pour un certain nombre de pays. Ce rapport tente de rendre compte de la diversité des réponses apportées, au sein des différents pays et entre eux, et s’appuie sur une grande variété de preuves.

La «décennie de Jomtien» a vu se produire dans le monde des changements importants, dont les conséquences ont été aussi bien positives que négatives pour la réalisation des buts de l’EPT: effondrement de régimes politiques, guerres civiles, progrès scientifiques et technologiques, fluctuations économiques majeures, etc. Ces changements ont eu des impacts différents suivant les pays et les régions.

La majeure partie de cette synthèse mondiale est consacrée à l’analyse des résultats, succès ou non, obtenus par les pays dans la réalisation des objectifs de Jomtien. Chacun des six objectifs fait l’objet d’un compte-rendu, qui repose en grande partie sur la documentation préparée en vue du Bilan de l’EPT pour l’année 2000 et les appréciations de leurs auteurs.

Issus de l’expérience acquise dans la poursuite des objectifs de l’EPT, un certains nombre de thèmes se recoupant ont émergé:

  • comment vaincre les obstacles à un meilleur accès et à une plus grande égalité des chances;
  • renforcer la qualité, la pertinence et l’efficacité de l’éducation;
  • Ttablir de nouvelles formes de partage des responsabilités et de prise de décision;
  • mobiliser les ressources et les utiliser plus efficacement;
  • créer une nouvelle base de connaissances éducatives.

Quels sont les résultats du mouvement EPT? Quels en sont les réussites majeures, les failles et les échecs? Les objectifs ont-ils été atteints? Qu’a-t-on appris et comment l’expérience de la décennie de Jomtien peut-elle servir pour élaborer et mettre en œuvre les étapes suivantes?

Les réponses apportées à ces questions ne sont ni simples, ni directes. Cela est dû en partie aux grande variations dans la quantité et la qualité des informations fournies. En outre, les réponses sont inévitablement complexes en raison de l’ampleur des objectifs et de la diversité des voies empruntées par les pays dans la définition et la poursuite de leurs propres buts. L’analyse des tendances, en particulier, est impossible à mener de manière systématique, mais le rapport est émaillé d’instantanés qui illustrent des expériences singulières ou des problèmes cruciaux. En dépit des difficultés d’analyse et d’évaluation, les avancées majeures, de même que les faiblesses à l’échelle mondiale, sont clairement identifiées. Les capacités de contrôle et d’évaluation se sont grandement améliorées, comme un résultat direct du mouvement de Jomtien et de ses prolongements. Cela seul représente déjà un acquis précieux pour le travail à venir.

L’intérêt de définir des objectifs est de stimuler la créativité dans la réflexion et la planification, et de mobiliser les énergies, ce qui s’est certainement produit à grande échelle. Les pays n’ont pas suivi le Cadre d’action de Jomtien de manière mécanique: ils l’ont interprété et modifié en fonction de leurs exigences propres. En cela, ils sont tout à fait en accord avec les contrats et les attentes initiales. Dans leur conception, les objectifs étaient des directions auxquelles chaque pays pourrait relier ses propres objectifs et stratégies. Il y a eu des faiblesses et des échecs, un manque d’engagement et d’encadrement, une planification et une gestion médiocres, des négligences envers des problèmes critiques. Dans une perspective mondiale, on ne peut pas dire que les objectifs aient été atteints, même partiellement, au regard de ce qui avait été envisagé il y a près de dix ans. Néanmoins, dans les domaines suivants, de réels progrès ont été faits en direction des objectifs de Jomtien:

  • améliorations significatives des objectifs de scolarisation et de participation à tous les niveaux de l’éducation de base, y compris l’éveil et la protection de la petite enfance;
  • réductions importantes des disparités dans certains pays, notamment de celles liées au sexe, au handicap et aux minorités ethniques;
  • réductions importantes dans un petit nombre de pays du volume et/ou du taux d’analphabétisme chez les adultes;
  • mise en œuvre dans plusieurs pays de politiques, cadres d’action, législations et moyens nouveaux en vue de poursuivre un ou plusieurs des objectifs de l’EPT;
  • implication plus grande des organisations non-gouvernementales, des groupes communautaires et des parents au niveau de la prise de décision, des programmes d’action et du fonctionnement des services d’éducation et de protection de l’enfance;
  • améliorations importantes dans le domaine de l’information éducative et des capacités d’analyse et d’évaluation (la base de connaissances);
  • les objectifs, s’ils n’ont pas été atteints ou entièrement réalisés, sont plus accessibles qu’il y a dix ans.

Quels que soient les échecs et les faiblesses, il y a suffisamment d’éléments dans cette synthèse pour montrer les réalisations et la valeur du mouvement EPT, et donner confiance dans l’avenir.

La «décennie de Jomtien»

Principes et buts

Les engagements et les promesses faites à Jomtien étaient basées sur des valeurs et des principes fondamentaux:

  • partout, les individus ont des aspirations fondamentales et des besoins humains à satisfaire: manger, se soigner, se former et s’éduquer afin de s’épanouir individuellement et de vivre en harmonie au sein de leur famille, de leur communauté et en tant que citoyens;
  • l’injustice, la pauvreté, la maladie, la guerre et la violence représentent des obstacles à la satisfaction des besoins humains fondamentaux;
  • toutes les sociétés ont des exigences fondamentales et des obligations envers l’ensemble de leurs citoyens, dont les droits, tels qu’ils s’affirment dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme, comprennent l’accès à l’éducation;
  • les individus et la société sont liés par un ensemble de droits, de responsabilités, de devoirs et d’engagements mutuels; l’éducation a pour mission de renforcer et d’enrichir ce lien.

Le mouvement de l’éducation pour tous (de Jomtien à Dakar et au-delà) affirme:

  • le droit de chaque individu, partout sur la planète, à l’éducation de base;
  • les besoins et les responsabilités des individus en tant qu’apprenants;
  • les aspirations du corps social et les exigences de ses membres en tant qu’apprenants;
  • la nécessité d’engagement, de leadership et d’évolution dans le domaine de l’environnement éducatif et l’instauration de contextes plus larges pour encourager et faciliter l’apprentissage.

L’objectif principal du mouvement mondial vers l’éducation pour tous n’est autre que l’accès de tous à une vie meilleure, enracinée dans les valeurs de la civilisation, les droits de l’homme et ses devoirs. Les objectifs fixés et les stratégies adoptées sont motivés par des accords et des engagements mondiaux à faire d’une vision une réalité vivante. Cette réalité, cependant, doit incarner et exprimer les principes qui sous-tendent la Déclaration de Jomtien et le Cadre d’action.

Ces principes sont éthiques, humains et civiques; ils tiennent compte des dimensions culturelles et sociales. Les obligations et les responsabilités mutuelles relient les individus et les communautés. Elles peuvent être décrites comme un ensemble de vertus sociales, associant bienveillance et efficacité. Au nombre de ces vertus: l’équité et la justice; l’égalité de traitement; l’empathie et la considération; la paix; la valorisation de la différence; une citoyenneté active et démocratique. Elles se combinent pour un idéal de vie pleine et harmonieuse pour tous, auquel contribue l’éducation.

Tous les individus – enfants dès le plus jeune âge, jeunes et adultes – ont-ils partout la possibilité d’accéder à l’éducation? Le Bilan de l’EPT à l’an 2000 soulève certaines questions concernant le rythme des progrès et les orientations prises dans la poursuite des objectifs. En répondant à ces questions, il est nécessaire d’examiner dans quelle mesure et selon quelles voies l’équité, la justice, la paix et la démocratie ont progressé.

Les six objectifs de Jomtiem pour l’éducation

Atteindre l’éducation universelle de base pose des défis très différents d’un pays et d’une région à l’autre, et pour des groupes spécifiques au sein d’un pays. Mais même ainsi, il est apparu possible de fixer un ensemble d’objectifs communs à l’ensemble des pays. Les pays ont été invités à Jomtien pour fixer leurs propres objectifs pour les années 1990 selon six dimensions.

Les pays ont fourni des données pour chacun de ces objectifs, lesquelles ont été analysées dans des rapports portant sur chaque groupe régional majeur: l’Asie et le Pacifique, les Amériques, les États arabes et l’Afrique du Nord, l’Europe, l’Afrique subsaharienne, les E9 (les neuf pays à forte population).

Ces objectifs ont été opérationnalisés et analysés dans le «Document statistique», à partir de 18 indicateurs de base. Ces indicateurs sont destinés à décrire et à mesurer les principales composantes de l’éducation de base telle qu’elle a été envisagée et définie à Jomtien, ainsi que les progrès réalisés au cours de la décennie. En dépit de l’encouragement et du soutien actif prodigués aux pays et aux régions afin qu’ils fournissent leurs données à partir du calcul de ces 18 indicateurs et d’autres méthodes, de nombreuses lacunes apparaissent. Les données statistiques et les rapports nationaux et régionaux révèlent des variations considérables dans le champ d’études et les thèmes abordés. Une série d’études thématiques spécifiques extrêmement rigoureuses, établies à la demande d’organisations intergouvernementales et d’ONG, s’appuie sur une documentation variée – données statistiques, enquêtes, articles de recherche, données empiriques et autres – pour éclairer et apprécier les tendances et les problèmes qui résident au cœur du mouvement vers l’EPT. Un certain nombre de rapports sur des thèmes et projets spécifiques ont été préparés, y compris sur les performances des élèves dans plusieurs des rapports du projet UNESCO-UNICEF «Le suivi permanent des acquis scolaires» (MLA). Mais en dépit de ces déficiences librement reconnues, la base de connaissances est infiniment plus riche en 2000 qu’en 1990.

Les six objectifs de l’EPT

  • Expansion des activités d’éveil et de protection de la petite enfance, y compris les interventions au niveau de la famille et de la communauté, particulièrement en faveur des enfants pauvres, défavorisés et handicapés;
  • universalisation de l’éducation primaire (ou de tout autre niveau d’éducation plus élevé considéré comme «fondamental»), d’ici l’an 2000;
  • Amélioration des résultats de l’apprentissage, telle qu’un pourcentage convenu d’une classe d’âge (exemple, 80 % des 14 ans) atteigne ou dépasse un certain niveau d’acquisitions jugé nécessaire;
  • réduction du taux d’analphabétisme des adultes (le groupe d’âge à prendre en considération étant fixé par chaque pays) par exemple à la moitié de son niveau de 1990 en l’an 2000, en mettant suffisamment l’accent sur l’alphabétisation des femmes pour réduire de façon significative la disparité actuelle entre les taux d’analphabétisme masculin et féminin;
  • expansion des services d’éducation fondamentale et des formations à d’autres compétences essentielles destinés aux adolescents et aux adultes, l’efficacité des actions étant appréciée en fonction de la modification des comportements et de l’impact sur la santé, l’emploi et la productivité;
  • acquisition accrue par les individus et les familles des connaissances, compétences et valeurs nécessaires à une vie meilleure et un développement rationnel et durable, grâce au concours de tous les canaux d’éducation – y compris les médias, les autres formes de communication modernes et traditionnelles et l’action sociale – l’efficacité de ces interventions étant appréciée en fonction de la modification des comportements.

(Note: le Cadre d’action de Jomtien invitait les pays à définir leurs propres objectifs en se référant à ces dimensions, mais n’escomptait pas que tous les objectifs quantitatifs puissent être atteint en l’espace d’une décennie)

Le programme élargi de Jomtien

Les objectifs proposés et, par suite, les indicateurs statistiques s’insèrent dans un cadre plus large de concepts, idéaux, idées et stratégies pour l’action, contenus dans la Déclaration de Jomtien et son Cadre d’action. Dans les documents de Jomtien, les concepts fondamentaux d’apprentissage et d’apprentissage dans différentes conditions et selon diverses modalités ont été abordés dans des contextes bien plus larges que la simple scolarisation ou l’accès à l’éducation formelle au travers de structures très proches du système scolaire. Cependant, dans les rapports nationaux, les comptes-rendus sur l’apprentissage restent souvent trop superficiels.

Entre autres considérations soulevées à Jomtien, citons: rentabiliser les coûts et améliorer l’efficacité; l’autonomisation locale et l’action communautaire; les handicapés; les partenariats; les statuts et conditions de travail des enseignants; l’éveil ¾t la protection de l’enfance; l’éducation dans le cadre de politiques multisectorielles (économie, commerce, travail, emploi, santé, etc.); les sources de financement bénévoles et privées.

Dans l’ensemble, bien que souvent implicites, un faisceau d’aspirations se dégage clairement pour les années 90: une meilleure politique de développement humain; des cadres législatifs et des régulations appropriés; des systèmes et procédures bien gérésý un personnel compétent et intègre; l’utilisation transparente et responsable des ressources; une meilleure prise de conscience du public; un meilleur accès à l’apprentissage et de meilleurs résultats. Le fait que, dans de nombreux pays, une ou plusieurs de ces aspirations n’aient pas été satisfaites ou n’aient pas fait l’objet d’un compte-rendu n’est en aucun cas une raison pour renoncer à les inscrire ou les diluer dans la planification future.

...reflet de l’époque

À Jomtien, les environnements politiques, sociaux, économiques et culturels, qui tout à la fois conditionnent les pratiques et les politiques éducatives, s’alimentent et se modifient réciproquement au travers de l’éducation, ont fréquemment retenu l’attention. La conférence s’est félicitée des progrès réalisés (à cette époque) en direction de l’entente pacifique, d’une meilleure coopération entre les nations, de la reconnaissance accrue des capacités et des droits des femmes, du développement des services d’information et des avancées culturelles et scientifiques.

Ces tendances positives, et d’autres, ont été contrebalancées au début des années 90 par d’autres forces et situations susceptibles de compromettre les progrès futurs: montée de l’endettement; risques de stagnation et de déclin économique; augmentation rapide et problématique, de la population; disparités économiques et dans d’autres domaines à l’intérieur et entre les pays; guerre, occupation et discorde civile; migrations forcées; violences; dégradation générale de l’environnement; et mort de millions d’enfants qui aurait pu être évitée. Ces forces négatives avaient entraîné des reculs majeurs en matière d’éducation au cours des années 80, en particulier – mais pas seulement – dans les pays les moins avancés.

...mais de nouveaux contextes émergent

La Déclaration de Jomtien et son Cadre d’action répondaient à un contexte historique particulier. Aujourd’hui, dix ans plus tard, ce contexte s’est transformé. Dans le cadre fluctuant des années 90, des thèmes auxquels la conférence n’avait pas prêté grande attention, des évolutions qu’elle n’avait pas anticipées sont apparus au premier plan. Leur importance et leur impact nécessitera une refonte partielle du nouveau programme et par suite de nouveaux objectifs spécifiques pour l’étape suivante de l’EPT.

Parmi les transformations les plus importantes au cours de la décennie, citons:

  • les transitions politiques, sociales et économiques des pays d’Europe centrale et de l’Est;
  • le développement rapide d’Internet, levier de transformation universel dans l’organisation de la vie courante, du commerce, des loisirs et de l’éducation;
  • L’émergence de la nouvelle économie reposant sur un capital intangible et qui exige une très grande capacité d’adaptation à des rythmes d’évolution rapides, ainsi que de nouvelles attitudes et capacités, inspirées par l’esprit d’entreprise;
  • les progrès considérables dans le domaine des sciences de la vie et leurs profondes implications;
  • les migrations volontaires et forcées et le métissage des peuples et des cultures;
  • l’augmentation de la pauvreté et l’endettement croissant au pied de citadelles de plus en plus riches;
  • enfin, les progrès rapides de la mondialisation économique et culturelle.

Des pays entiers, certaines contrées, ont vu leur économie décliner, voire s’effondrer tandis que d’autres ont connu des cycles de croissance sans précédent. Les zones de conflit et de troubles civils se sont multipliés, prenant en otage des populations entières. Dans certaines régions, l’Afrique subsaharienne notamment, il y a eu la propagation du virus HIV/sida et ses conséquences monstrueuses. Il semble, également, qu’il y ait eu une intensification des désastres naturels liés aux changements climatiques, soulignant la nécessité d’améliorer considérablement la qualité des services d’urgence.

Les questions abordées à Jomtien restent pour la plupart éminemment pertinentes mais il convient de leur donner un nouvel éclairage, le contexte n’étant plus le même.

Il existe une continuité fondamentale de Jomtien à Dakar et au-delà, mais ces questions et d’autres thèmes contextuels appellent une révision des programmes. Un nouveau Cadre d’action s’impose en vue de renforcer la mission, de poursuivre le travail inachevé et d’assumer les nouveaux défis.

...et la nécessité de renforcer la mission de l’EPT

Le renforcement stratégique de la mission de l’EPT et de la nécessité avérée de déployer des efforts continus provient de différentes sources: premièrement, la croissance continue de connaissances systématiques qui inclue une meilleure compréhension des changements intervenus dans le contexte plus large qui affecte l’éducation; deuxièmement, un série de conférences mondiales tout au long des années 90 qui ont tout à la fois documenté, placé au centre de l’attention et rendu visible les problèmes mondiaux majeurs, dont beaucoup ont des implications tout à fait directes en éducation (voir appendice); et troisièmement, les changements intervenus dans la communication, le commerce et la finance internationale, qui ont aiguisé la conscience du public en ce qui concerne l’interdépendance et les déséquilibres mondiaux.

Le progrès des connaissances et de la compréhension en matière d’éducation est particulièrement pertinent à l’égard de l’accomplissement de la mission de Jomtien. Bien que Jomtien n’en ait pas fait une cible spécifique, l’accumulation de connaissances a été en fait un de ses résultats les plus positifs, dont les implications en ce qui concerne le potentiel stratégique futur et la capacité d’action et de mobilisation des ressources sont particulièrement intéressantes.

Au terme de la décennie et dans de nombreux pays, il y a bien plus de systèmes de pointe au service de l’analyse et de la collecte de données qu’il n’en existait dix ans auparavant. L’Institut de statistiques de l’UNESCO a déployé un bel effort, en collaboration étroite avec les bureaux de statistiques nationaux ou autres du monde entier, pour surmonter les lacunes héritées des années précédentes. Les rapports nationaux, les synthèses régionales et les études spécifiques fourmillent d’exemples sur l’amélioration des sources de données et des progrès dans les connaissances. Tous les problèmes n’ont pas été résolus mais ils sont, du moins, mieux documentés et mieux compris. C’est un pas décisif vers leur résolution.

Bien sûr, toutes les améliorations au niveau des connaissances éducatives ne sont pas attribuables à Jomtien, mais plusieurs avancées significatives s’inscrivent dans la lignée du Cadre d’action de Jomtien et reprennent ses objectifs. Par exemple, l’initiative prise par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), visant à définir un ensemble d’indicateurs pour l’éducation est antérieure à Jomtien et s’est développée dans une large mesure indépendamment d’elle, comme d’ailleurs les démarches de cette organisation en vue d’évaluer les tendances et les développements de l’éducation dans les pays membres et non membres. De la même façon, les statistiques éducatives de l’Union européenne (Eurostat), ses études et celles du Conseil de l’Europe et d’autres institutions internationales sont autonomes. Elles peuvent néanmoins être considérées comme des réalisations régionales majeures, contribuant de diverses manières à la mission de l’EPT. Elles recèlent un potentiel qui s’étend bien au-delà des régions concernées.

La question de savoir si les programmes de développement spécifiques, les progrès de la recherche, l’avancement des connaissances pour la prise de décision sont attribuables à Jomtien est de peu d’importance au regard de leur développement et du renforcement du large mouvement international en vue d’améliorer l’éducation et l’apprentissage.

Renforcer les bases de données

Au cours des années 90, de nombreux pays ont renforcé leur potentiel de collecte et d’analyse des données éducatives et leur capacité à évaluer les résultats. L’élaboration des indicateurs de l’EPT, des rapports nationaux et régionaux et des rapports mondiaux de l’UNESCO sur l’éducation les y ont encouragés. Des dispositifs nationaux introduisent de nouvelles structures ou renforcent celles existantes. Citons par exemple le Cadre national de qualification en Afrique du Sud, le Bureau des normes éducativýs en Angleterre et au pays de Galles, le système d’observation et de rapports d’évaluation du ministère de l’Éducation nationale en France et le rôle d’évaluation de l’Institut national d’études et de recherche en éducation, au Brésil. En participant au projet UNESCO/UNICEF de suivi des acquis scolaires, plus de cinquante pays ont acquis une meilleure intelligence des performances scolaires des élèves.

Le concept évolutif d’éducation de base:
scolarisation, éducation et apprentissage tout au long de la vie

Lorsqu’elle déclare que l’éducation est un droit et un besoin universel, la Déclaration de Jomtien donne à ce mot le sens d’apprentissage au sens le plus large – formel, non-formel et informel – et à tous les âges de la vie. L’apprentissage peut se faire à l’école ou ailleurs – à la maison, au sein de la communauté locale, sur le lieu de travail, dans des contextes récréatifs ou autres. Il n’est pas confiné à l’enfance ni aux années pendant lesquelles se développe la personnalité et débute dès le plus jeune âge pour continuer tout au long de la vie. L’éducation «de base» ne se limite plus au cycle primaire ou à l’éducation formelle. Une importante réalisation du mouvement vers l’EPT est l’attention plus grande portée, en particulier par les ONG et les organisations bénévoles, aux bases de l’apprentissage chez les enfants de 0 à 6 ans. Il est de plus en plus admis que la protection, la nutrition et tout ce qui peut encourager le développement général de l’enfant à cette étape de la vie sont d’une importance cruciale pour sa croissance ultérieure et pour lui permettre de compléter une éducation de base satisfaisante.

Il s’avère de plus en plus nécessaire également de trouver des structures appropriées venant en appui et reconnaissant différents types d’apprentissages jusque là négligés ou dont les systèmes éducatifs formels se sont désintéressés. La plupart des pays commencent tout juste à élaborer de nouvelles démarches pour évaluer les compétences et établir des diplômes d’un nouveau genre, récompensant un apprentissage expérimental reçu en dehors des institutions éducatives formelles. Pour tous les types d’éducation, il est possible de mettre en œuvre de manière extensive une grande variété de médias, de contextes et de ressources jusque là inexploitées, comme l’ont souligné plusieurs études spécifiques (1).

Une fois établis la diversité des apprentissages et le danger de mettre le signe égal entre «apprentissage» et «scolarisation», on ne peut nier que la structure scolaire développe chez la plupart des individus les bases indispensables qui leur permettront d’apprendre tout au long de leur vie. Comme l’ont fait ressortir de nombreux rapports nationaux, la scolarisation est préparée par un programme d’éveil et de protection de l’enfance (EPPE). Elle peut être complétée par la préparation professionnelle, l’éducation tertiaire ou la formation des adultes, permanente et structurée, formes d’enseignement qui ont atteint un niveau de développement très avancé dans un nombre croissant de pays. Les écoles et les professeurs d’écoles peuvent également servir les objectifs d’alphabétisation des adultes et les programmes d’éducation permanente, dans les pays du tiers-monde où ils jouent un rôle essentiel, mais également ailleurs.

S’il convient de reconnaître les contributions majeures, indispensables, de toutes sortes d’organisations bénévoles, communautaires et autres formes d’auto-organisation en faveur de l’éducation et de l’apprentissage, il reste que l’action des pouvoirs publics pour construire des écoles, garantir à tous une place et une chance en leur sein et encourager activement la réussite et les progrès en milieu scolaire forment toujours les ingrédients essentiels et incontournables de l’EPT.

L’EPT s’engage à réaliser l’éducation de base. Mais ce n’est pas un concept fixe, défini une fois pour toutes, et recommandation a été faite aux pays réunis à Jomtien de lui attribuer leur propre définition. La plupart, ce qui ne veut pas dire tous, ont choisi de restreindre l’éducation «de base» au cycle primaire, soit la première étape de la scolarisation formelle – que tant de pays doivent encore atteindre. Aujourd’hui cependant, et pour un nombre croissant de pays, l’expression «de base» ne recouvre plus seulement la protection de la petite enfance et l’enseignement primaire. Dans certains pays, elle engobe le cycle secondaire correspondant au collège et dans d’autres, elle correspond à un cycle secondaire complet. La Chine, par exemple, recentre actuellement son action, dans la majeure partie du pays, de l’enseignement primaire vers les neuf années d’école obligatoire, précédés d’un ensemble de programmes d’éducation et de protection de la petite enfance. Les Principes directeurs pour l’éducation nationale et le Cadre législatif instaurés au Brésil en 1996 ont défini comme étant «de base» l’ensemble du dispositif allant des services de garde d’enfants à la sortie du cycle secondaire. Au Nigéria, l’éducation «de base» correspond à l’éveil de la pýtite enfance et à l’éducation préprimaire, au cycle primaire et aux trois premières années du cycle secondaire. Pour l’ensemble de l’Europe, de l’Amérique du Nord, de l’Australie, du Japon et de certaines régions de l’Asie du Sud-Est, l’éducation «de b1se» regroupe les cycles primaire et secondaire.

Dans un petit nombre de pays, qui tend cependant à augmenter, un certain type d’éducation post-secondaire ou tertiaire tend à être intégré dans l’éducation «de base», parce qu’elle apparaît comme un bagage indispensable pour l’entrée dans la vie professionnelle ou pour la poursuite des études de tous les jeunes. Des initiatives sont prises, qui visent à incorporer tous les niveaux et toutes les formes d’éducation dans un cadre d’apprentissage pour tous, tout au long de la vie. Ces initiatives exigent de réexaminer ce qu’il convient d’apprendre et d’enseigner au cours de l’enfance et de la jeunesse, afin de poser les bases d’un apprentissage permanent.

Compte tenu de la difficulté de maintenir des distinctions tranchées, pour une meilleure communication et rendre plus aisée la définition des objectifs, l’éducation de base exige d’être redéfinie en référence aux expressions «technique», «spécialiste», «supérieure», «tertiaire» et «tout au long de la vie».

L’expression «de base» dans ce rapport fait référence aux compétences, connaissances, attitudes, valeurs et motivations que l’on estime nécessaires pour permettre aux individus de maîtriser pleinement les compétences en lecture et en écriture et d’acquérir les bases nécessaires pour entamer un voyage d’apprentissage qui se prolongera tout au long de leur vie. L’éducation de base commence à la naissance et peut être dispensée par des moyens et des institutions aussi bien formels que non-formels. Les compétences, les savoir-faire et les connaissances pratiques définis comme «de base», lorsqu’ils sont dispensés dans le cadre de l’école ou d’autres institutions similaires, sont souvent établis sous la forme d’un programme central, qui tout en englobant les compétences en lecture et en s’appuyant sur elles, intègre la maîtrise du calcul, des connaissances sociales et scientifiques, l’éducation physique et sportive, l’enseignement artistique et l’éducation manuelle. Les compétences que sont la littératie visuelle et auditive dans un monde où le multimédia est omniprésent – ne sont pas moins «de base» que les compétences verbales ou le calcul. En résumé, les quatre «piliers de Delors» – apprendre à connaître; apprendre à faire; apprendre à vivre ensemble; apprendre à être – revêtent une égale importance.

La longueur et la nature du cycle scolaire défini comme «de base» varie d’un pays à l’autre: d’un minimum de 3-4 ans d’école primaire à un cycle de neuf ans, ou encore l’achèvement d’un cycle secondaire complet. Les programmes et campagnes d’alphabétisation des adultes sont un exemple d’éducation de base non-formelle, comme le sont les campagnes sanitaires au sein des communautés, l’éducation des parents en matière de soins aux enfants et les campagnes d’éducation menées par le biais des médias. Il conviendrait que l’expression «de base», appliquée à ces degrés d’éducation minimum, désigne les toutes premières étapes d’un processus nécessairement destiné à croître et à se poursuivre.

Objectifs communs et situations diverses

Comme l’indiquent les rapports du Bilan de l’EPT à l’an 2000, l’éducation, et plus particulièrement le système scolaire, est solidement enracinée dans les conditions historiques, culturelles, sociales, économiques et politiques des pays et de leurs différentes régions. Elles forment des environnements qui influencent profondément non seulement les politiques, les lois, les régulations et les ressources mais aussi la qualité des programmes, les compétences des enseignants et les conditions d’enseignement et d’apprentissage. Les pays ne sont pas affectés par ces conditions de la même manière, de même que les régions, les groupes, les familles et les individus à l’intérieur des pays.

La question se pose donc de savoir dans quelle mesure les buts et les objectifs peuvent encore être décrits comme «communs», alors que tant de sens différents sont attachés au terme «de base» et devant la diversité des situations en regard de l’objectif à atteindre, non seulement entre mais aussi à l’intérieur des pays. Les six objectifs ont été définis au début de la décennie de manière suffisamment générale pour être applicables partout, avec tout de même un biais pour certains d’entre eux vers les pays à faible taux de participation et d’alphabétisation. La traduction de ces objectifs généraux en programmes et en politiques spécifiques à une région a été judicieusement laissée à la charge des pays eux-mêmes, ainsi que le choix du rythme de progression pour les atteindre. Aussi, l’un des aspects les plus problématiques de l’EPT – la poursuite de buts communs et la mise en œuvre de stratégies dans des situations extrêmement diversifiées – doit rester au premier plan dans l’évaluation des résultats de la décennie de Jomtien. D’énormes différences apparaissent inévitablement dans les rythmes de progression, compte tenu des niveaux de départ très différents et de la diversité des environnements.

Si les indicateurs globaux, régionaux et nationaux disent beaucoup, ils ne peuvent refléter toute la gamme des facteurs qui interviennent ni la diversité des offres éducatives, des moyens et des réponses de chaque pays. C’est en prêtant attention aux conditions environnementales, comme l’ont rapporté divers documents d’évaluation des progrès et des problèmes, que la diversité peut être le mieux comprise. De nombreux pays, tout en relevant les défis de Jomtien et en poursuivant leurs stratégies de réforme, ont adapté leurs objectifs en fonction des diverses situations. Ainsi, au Brésil, les disparités extrêmes entre régions ont été l’occasion pour le gouvernement national, œuvrant dans un cadre fédéral, d’adopter une démarche différenciée en matière de financement et de permettre une redistribution. En Chine, il existe selon les régions différents objectifs concernant la durée de scolarisation du cycle primaire. Probablement, à long terme, il n’y aura plus que l’objectif général des neuf ans de scolarité obligatoire, mais cela n’est pas pour tout de suite.

Inévitablement, une bonne part des préoccupations qui se sont exprimées dans les rapports sur les progrès réalisés depuis Jomtien traitent des difficultés auxquelles sont confrontés de nombreux pays et leurs différentes régions. Prendre les dispositions qui s’imposent pour garantir l’accès et la participation des apprenants à l’éducation et faire en sorte que les enseignants soient convenablement préparés, aient suffisamment de matériel et de moyens pour mener à bien leur travail reste un défi monumental pour nombre de pays et de régions. Ces difficultés reflètent des conditions et des situations qui échappent en partie au système éducatif. Bien que n’étant pas fréquemment propices à l’action directe au travers de programmes et de politiques éducatives, il importe néanmoins de répondre à ces situations, en tant que conditions dans lesquelles opère l’EPT et parce qu’elles sont susceptibles avec le temps d’être modifiées, voire complètement inversées par une population convenablement éduquée. La nécessité de renouveler l’engagement paraît évidente dans les pays où les progrès ont été faibles ou inexistants.

Des politiques éducatives qui abordent sans détour les questions essentielles sont nécessaires et donnent des résultats, comme l’illustrent les pays qui progressent aujourd’hui. La réforme de l’éducation peut en elle-même constituer un levier puissant pour permettre une utilisation plus efficace des ressources et améliorer les conditions économiques et sociales, souvent perçues comme un obstacle au développement de l’éducation.

Réduction du taux d’analphabétisme des adultes

OBJECTIF – Réduction du taux d’analphabétisme des adultes (le groupe d’âge à prendre en considération étant fixé par chaque pays), par exemple à la moitié de son niveau de 1990 en l’an 2000, en mettant suffisamment l’accent sur l’alphabétisation des femmes pour réduire de façon significative la disparité actuelle entre les taux d’analphabétisme masculin et féminin.

L’évolution de la notion d’alphabétisation

L’alphabétisation a fait l’objet au fil des ans d’interprétations diverses, depuis l’idée première d’un déficit à combler dans les compétences fondamentales que sont la lecture et l’écriture dans la langue maternelle, jusqu’au concept beaucoup plus vaste de la création d’une culture de l’écrit et de la participation active à celle-ci aux niveaux individuel, local, national et régional (12). Des termes tels que «un environnement lettré», «une culture de la lecture», «la postalphabétisation», «l’éducation continue et non formelle», «l’éducation des adultes et les apprenants adultes» donnent une idée approximative de l’étendue et de la diversité du champ pris en compte. De même que des mesures comme celle du niveau des dépenses publiques allouées à l’éducation non formelle ou au soutien des familles et des communautés servent à indiquer le degré d’engagement à l’appui des programmes d’alphabétisation. De même, «l’alphabétisation des adultes» est un indicateur qui recouvre un large éventail de résultats d’apprentissage des adultes.

Pendant les années 1990, l’alphabétisation est, en quelque sorte, devenue le produit de plusieurs facteurs en interaction complexe: facteurs culturels, sociaux, économiques et éducatifs, et non comme un désordre ou une maladie qu’il est possible de faire disparaître prestement et avec efficacité (13). Les vieilles notions opérationnelles liées à l’alphabétisme (niveau d’apprentissage scolaire, compétence en matière de décodage ou de déchiffrement du texte écrit) ont été complétées dans les années 1960 par le concept plus large de compétence fonctionnelle dans la société. Il s’agit d’aptitudes d’un niveau supérieur, celles qui permettent aux gens de fonctionner dans la communauté et sur le lieu de travail, d’atteindre des buts personnels et de développer des connaissances et des potentialités qui leur sont propres. Cet élargissement des concepts suppose que l’on porte une attention soutenue aux contextes, aux utilisations, aux applications et à l’évolution des rapports entre l’individu et la société. Un exemple frappant est l’impact de la technologie et la nécessité qui s’ensuit pour un plus grand nombre de gens de se familiariser avec elle pour devenir capable de se servir efficacement des instruments de communication et de traitement de l’information qu’elle met à leur portée. La question de l’alphabétisme visuel, qui correspond à la capacité de lire des graphiques et des courbes, se pose aujourd’hui. Le fossé croissant qui sépare ceux qui sont, ou peuvent être, technologiquement «alphabètes» de ceux qui ne le sont pas s’est révélé être dans les années 1990 un thème tout aussi important que la nécessité reconnue depuis longtemps d’avoir accès à des textes imprimés pour les étudiants.

Dependant, toutes les définitions commencent par la capacité de se servir d’un texte imprimé. On continue d’appliquer des définitions minimales, par exemple dans la compilation des statistiques. Mais là aussi, on voit apparaître des variantes intéressantes. Par exemple, les critères appliqués dans le règlement chinois visant l’élimination de l’analphabétisme sont:

«la reconnaissance de 1500 caractères chinois pour les paysans et de 2000 caractères pour les cadres et les ouvriers des entreprises commerciales et industrielles et pour les habitants des villes, la capacité de lire des journaux et des articles simples et faciles, la capacité de tenir une comptabilité simple et de rédiger des écrits pratiques simples.» (14)

La définition que donne l’UNESCO du taux d’alphabétisation des adultes, énoncée dans les principes directeurs techniques de l’EPT à l’usage des pays, est le pourcentage de la population âgée de 15 ans et plus qui est capable de lire et d’écrire, en le comprenant, un énoncé simple portant sur sa vie quotidienne. Mais les pays ont également été invités à fournir des indications sur les «environnements lettrés» et les possibilités d’apprentissage, spécialement pour les femmes, les minorités ethniques et culturelles, les groupes socialement désavantagés et d’autres éléments ayant des besoins éducatifs spéciaux.

Ainsi, la première question qui se pose est celle de la nature des différents objectifs que visent chaque pays et des différents groupes à l’intérieur de chaque pays. Si, dans beaucoup d’économies avancées, une scolarité de huit à dix ans (et plus) est universellement en place et les niveaux d’aptitude à la lecture mesurés à l’école sont relativement élevés, il semblerait que l’objectif de l’alphabétisation de base ait été atteint. Néanmoins, des études récentes menées dans des pays économiquement développés indiquent qu’il y aurait entre 10 et 20 % de la population adulte qui aurait des difficultés à maîtriser les aptitudes élémentaires de la lecture, de l’écriture et du calcul.

L’approche qui consiste à prendre comme indice de l’alphabétisation des adultes l’achèvement d’une scolarité primaire de plusieurs années n’est pas toujours satisfaisante. Par exemple, les pays se déclarent souvent satisfaits si un taux d’alphabétisation de 80 % est atteint à un niveau ou un âge donné, mais peut-être ne portent-ils pas suffisamment d’attentions aux 20 % restants. Par ailleurs, les changements rapides qui interviennent dans la technologie et dans le monde du travail et une demande croissante de responsabilités civiques et sociales plus diffuses ont pour effet de rendre insuffisants les savoir-faire acquis à l’école primaire. Qui plus est, on a constaté que ces compétences se dégradent si elles ne sont pas convenablement exercées.

Il y a donc plusieurs aspects de l’alphabétisation à prendre en compte: l’acquisition de compétences de base, les objectifs concernant les alphabètes peu performants, la participation active à une culture de l’écrit, des concepts tels que celui d’«alphabétisme technologique et visuel», l’évolution des contextes d’utilisation de l’alphabétisme et l’entretien et l’amélioration de l’alphabétisme au-delà de l’acquisition des compétences de base. En adoptant la définition restreinte que l’UNESCO donne de l’alphabétisme de base, les pays peuvent faire état de progrès considérables, et plusieurs le font en effet. Ces progrès ont bien sûr une importance toute spéciale mais il ne faut pas oublier que les chiffres ne rendent pas compte de l’alphabétisme au sens élargi du concept qui prend une importance croissante au fur et à mesure que, partout, l’analphabétisme sous sa forme la plus brute ou rudimentaire recule lentement.

Les tendances de l’alphabétisation

Les campagnes d’alphabétisation ont une longue histoire, bien antérieure à la décennie de Jomtien. Elles font partie d’un combat incessant qui vise à créer des sociétés entièrement lettrées.

Les objectifs d’alphabétisation

Pour réduire et parvenir à éliminer l’analphabétisme, les programmes visent:

  • à réduire le nombre total d’analphabètes dans les populations qui continuent à croître;
  • à améliorer les taux d’alphabétisation pour des tranches d’âge et des groupes spécifiques de la société;
  • à faire en sorte que l’alphabétisation acquise à l’école ne se perde pas;
  • à user de l’alphabétisation comme d’un levier du progrès social, culturel et économique;
  • à fixer simultanément des normes de performance plus élevées, à mesure qu’apparaissent des concepts plus larges que celui d’alphabétisme et de cultures lettrées.

De réels progrès ont été accomplis dans les années 1990, bien que le nombre d’analphabètes demeure très élevé et soit en augmentation dans certaines parties du monde. On estimait le nombre d’analphabètes dans le monde à 895 millions en 1990, à 887 millions en 1995 et à 875 millions en 2000. Ce sont en grande majorité des femmes, dans des pays en voie de développement.

Dans les pays arabes pris dans leur ensemble, il n’est fait état que de progrès modérés de réduction du taux global d’analphabétisme. On relève de grandes différences entre les pays et à l’intérieur de ceux-ci. Les disparités entre les sexes se sont, en fait, accentuées dans cette région, ce qui traduit le maintien du préjugé culturel qui y sévit à l’encontre de la scolarisation et de l’éducation des femmes. Pour l’ensemble de la région, le taux d’alphabétisation s’est élevé, de 10 % seulement au cours des dix dernières années, passant de 51,3 % à 61,5 %. L’analphabétisme le plus répandu est désigné comme étant le principal obstacle à la réalisation des objectifs de l’éducation pour tous dans les pays arabes au début du XXIe siècle. Dans le rapport régional des États arabes, le nombre d’analphabètes est estimé à 68 millions, dont 43 millions de femmes. Un quart de cet effectif se trouve dans un seul pays, l’Égypte (17 millions) et l’Égypte, le Soudan, l’Algérie, le Maroc et le Yémen s’en répartissent 70 %. L’analphabétisme est lié, dans la plupart de ces pays, à une forte densité de population, à la pauvreté et à la ruralité.

Si considérables que soient ces nombres, ils sont modestes comparés à ceux de l’Asie du Sud. Au Bangladesh et en Inde, près de la moitié de la population adulte est encore analphabète, et au Pakistan le taux d’alphabétisation des adultes est le plus bas de la sous-région, avec 40 % en 1998, et un taux d’amélioration annuelle très lent (0,7 %) entre 1991 et 1998. L’Afrique subsaharienne comprend une tranche de pays qui comptent 50 % – ou moins – d’alphabètes et dont l’axe traverse l’Afrique d’est en ouest en passant par le Sahara (en Afrique de l’Est, le niveau général d’analphabétisme est du même ordre qu’en Asie du Sud). À ces pays s’ajoutent l’Angola, le Mozambique et Madagascar.

Cependant il y a aussi sur le continent africain des pays limitrophes ou voisins qui font état de taux d’alphabétisation des adultes s’élevant jusqu’à 90 % (Swaziland) ou 77 % (Kenya). Ces chiffres indiquent une progression vers les objectifs, maintenant près d’être atteints. Les synthèses régionales ne fournissent pas d’explications de cette diversité mais il conviendra de chercher à les connaître dans des travaux ultérieurs. Les forts taux d’alphabétisation atteints dans certains pays d’Afrique confirment l’idée que les objectifs de Jomtien peuvent être atteints. En faisant la part de mauvais résultats imputables à des crises graves et moyennant une forte détermination, les pays sont en mesure de faire advenir les améliorations qu’exige leur adhésion à la déclaration de Jomtien.

Des progrès importants ont été réalisés et il y a, de la part des gouvernements, des communautés et du secteur non gouvernemental et des organismes internationaux, une prise de conscience de la nécessité de redoubler d’efforts. Il faut à la fois continuer à mettre en œuvre les programmes d’alphabétisation efficaces qui sont déjà en place et en lancer d’autres selon les besoins afin d’augmenter de manière significative le nombre de personnes alphabètes et de réduire d’autant le nombre d’analphabètes. Certains pays (les Maldives et le Sri Lanka, par exemple), qui ont obtenu des taux d’alphabétisation très élevés ou proches de l’alphabétisme universel, s’engagent actuellement sur la voie de l’amélioration de l’alphabétisme fonctionnel. Dès lors, leurs objectifs sont d’un autre ordre que ceux des pays où l’alphabétisation de base pour tous demeure un objectif lointain.

Les programmes appliqués au niveau infranational et qui conditionnent tant de choses dans des pays hétérogènes aux populations très nombreuses sont particulièrement intéressants. En Inde, par exemple, les campagnes d’alphabétisation dans les districts (TLC) ont abouti à un taux d’alphabétisation d’environ 80 % dans certains districts. Cette façon de procéder, appelée «le mode campagne», s’appuie au niveau des villages sur la participation des personnes et les coûts restant faibles, elle fait intervenir des ONG et adopte des stratégies très diverses. Cependant, malgré des résultats spectaculaires obtenus dans certains villages au début des années 90, les progrès ont ralenti. Il y a différentes versions des faits et différentes explications qui en sont données. Il paraît certain que privilégier la prise en main par les communautés de leur propre destin, l’action bénévole et une politique de saturation devrait permettre de réaliser des progrès considérables. (16)

Nombre d’ONG ont fait preuve d’esprit d’initiative dans les opérations d’alphabétisation, avec notamment le ciblage des femmes et des filles analphabètes, par exemple dans les activités des associations de femmes universitaires et d’autres organisations d’Afrique, d’Asie du Sud, d’Amérique latine et de la région Pacifique dont il est fait état dans l’évaluation effectuée par Berewa Jommo (Gender Dimensions in Education for All: NGO and Civil Society Experiences). Ces initiatives, qui s’inscrivent expressément dans le contexte local, à défaut de pouvoir réaliser de grands progrès dans l’éducation des filles et des femmes, visent au moins à empêcher une aggravation de l’érosion dans les régions les plus difficilesÈ Ces interventions mettent en relief l’importance capitale des relations croisées entre les attitudes socioculturelles envers les filles et les femmes, les activités professionnelles et la pauvreté.

Plusieurs rapports indiquent que, pour diverses raisons, il est très difficile d’obtenir des estimations fiables des taux d’alphabétisation: manque d’indicateurs clairs et d’éléments d’information disponibles et accessibles, multiplicité et diversité des initiatives des ONG et des groupes communautaires et problèmes de définition déjà évoqués. Un de ces problèmes tient au fait que l’estimation des taux d’alphabétisation des adultes s’effectue sur la base d’un alphabétisme autodéclaré lors des enquêtes sur le terrain ou des recensements. Il s’agit d’un mode d’estimation très grossier auquel s’associe une grande marge d’erreur d’appréciation. Les chiffres eux-mêmes sont parfois aussi manipulés, car il peut être important que des programmes paraissent couronnés de succès alors qu’il n’en est rien. Dans ces conditions, on ne saurait trop insister sur le fait que les données empiriques sur lesquelles reposent les chiffres, les pourcentages et autres taux de changement indiqués sont très souvent douteuses. Ceux-ci doivent toujours être accompagnés de jugements et d’appréciations portés sur le terrain par les personnes responsables des programmes et qui en sont les protagonistes. Ainsi, les résumés que comportent les synthèses régionales tiennent compte, autant que des tendances générales, des succès qui sont rapportés, mais aussi des échecs et des raisons avancées pour les expliquer.

Bien que le mouvement en faveur de l’alphabétisation soit poursuivi sans relâche, les progrès sont souvent lents. Au Bangladesh, au Pakistan et dans certaines parties du Brésil, l’alphabétisation de base mais aussi, à un niveau de définition plus général, le taux d’alphabétisme fonctionnel demeurent des problèmes préoccupants. La Déclaration de Recife émise par les neuf pays à forte population place ainsi l’élimination de l’analphabétisme des adultes en tête des priorités.

De nombreux pays font état de progrès faibles ou nuls de leurs taux d’alphabétisation – les programmes sont distancés par l’accroissement de la population, ou sapés par la guerre civile, la maladie, l’immigration, des taux de rétention médiocres et d’autres facteurs inhibants. Il y a cependant des pays et des régions qui ont accompli des progrès en dépit de la gravité de leurs problèmes ou de leurs échecs. Il est extrêmement difficile d’éradiquer l’analphabétisme, mais avec le temps, si la volonté d’aboutir est présente et si l’effort nécessaire est consenti, cela est possible.

Dans de nombreuses régions du monde, il s’agit avant tout de permettre à des adultes qui n’ont reçu aucune instruction scolaire formelle ou ont le bagage minimum le plus élémentaire, d’acquérir des compétences de base. Or l’objectif de Jomtien est bien plus ambitieux que cela: réduire de moitié le taux d’analphabétisme de 1990. En outre, on ne peut pas arrêter la définition de l’alphabétisme au niveau de fonctionnement minimum; il faut au contraire l’élargir pour y inclure des attentes croissantes dans l’ordre de la communication interpersonnelle et officielle, dans celui de la vie culturelle et sociale et dans celui de l’activité économique.

On ne saurait dire si l’objectif de Jomtien a été atteint au cours des années 1990 dans l’un des nombreux pays où vivent de très nombreux analphabètes. De grandes différences demeurent et se sont parfois même accentuées entre les zones urbaines et les régions rurales, entre les segments riches et pauvres de la population, entre les populations minoritaires et les populations majoritaires. Les femmes pâtissent encore d’une discrimination. Tout cela indique qu’il faut axer les campagnes d’alphabétisation sur les groupes les plus défavorisés et les zones difficiles, même si l’on peut s’attendre à ne faire dans certains cas que des progrès assez lents. Des objectifs généraux, fixant des pourcentages de réduction pour l’ensemble d’un pays, risquent d’être moins productifs qu’un ciblage plus précis prenant en compte des variables clés (situation démographique, emplacement géographique, profils professionnels, conditions socio-économiques, ethnie, traditions et coutumes locales, sexe, etc.) Les chiffres donnant le nombre d’analphabètes (de plus de 15 ans) comportent, par exemple, des variations considérables selon «l’origine raciale» – au Brésil, l’échelle va de 5,4 % à 50,8 % dans le recensement de 1991.

Dans une grande partie de l’Inde, les taux d’alphabétisation des femmes adultes sont faibles à très faibles, comme l’indiquent les données détaillées à l’échelon des districts portées sur la carte du recensement de 1991. Ces données ont permis de cibler ýe financement des programmes au niveau des districts. Par exemple, l’actuel cycle quinquennal de financement du FNUAP repose sur un indice composite prenant en compte la mortalité, l’alphabétisme des femmes et la fécondité (aux lieu et place d’indicateurs économiques).

L’effort d’alphabétisation des adultes doit aussi porter sur les enfants et leur scolarité

Lorsqu’on se penche sur les taux d’alphabétisation des adultes, il ne faut pas négliger l’universalisation de l’accès des enfants à l’instruction scolaire fondamentale et leur alphabétisation.

À l’avenir, il est extrêmement important de faire entrer dans l’équation l’alphabétisation des enfants. Les problèmes que posent l’étendue et la diversité de certaines régions géographiques et la diversité des attentes culturelles, l’instruction scolaire inadaptée dans des régions pauvres et reculées et le manque de programmes et d’équipements appropriés pour les minorités linguistiques et culturelles, sont en l’état actuel des choses des facteurs potentiels de perturbations à venir. Il ne faut pas que le réservoir d’adultes analphabètes soit grossi par l’afflux d’enfants illettrés qui, soit n’auront pas fréquenté l’école, soit n’y auront suivi qu’une scolarité minimale et inadaptée.

Les leçons à tirer des actions d’alphabétisation

Les conclusions des bilans de l’EPT à l’an 2000 sur les problèmes saillants que pose l’analphabétisme des adultes sont familières et peu surprenantes. Comme d’autres dimensions auxquelles renvoie l’éducation pour tous, c’est dans les régions rurales et les zones urbaines marginales que l’analphabétisme demeure le plus répandu. La pauvreté est à cet égard un problème clé auquel il s’agit de faire face. Il faut amener les groupes et les communautés qui ont les plus bas niveaux d’alphabétisme à comprendre tout le profit qu’ils peuvent tirer de l’alphabétisation et à s’impliquer dans les campagnes au lieu d’être l’objet de stratégies conçues dans des hauts centres du pouvoir éloignés d’eux.

Un échantillon des initiatives d’alphabétisation en Amérique latine

Au Brésil, le Programme d’action solidaire pour l’alphabétisation des jeunes et des adultes est parainné par l’État et les instances municipales, le secteur privé et les ONG.

En Équateur, la Campagne nationale d’alphabétisation Monseñor Leonides Proano mobilise le soutien des universités, des instances judiciaires, des églises, des forces armées, des établissements secondaires, des organisations communautaires et d’acteurs bénévoles.

Au Salvador, des programmes ou des projets d’alphabétisation ont ciblé des femmes, des détenus et des réfugiés déplacés par la guerre civile. Ils ont bénéficié du soutien de l’UNESCO, du PNUD, de la Coopération espagnole et de la Communauté européenne.

Au Guatemala, des programmes ont été menés par l’intermédiaire d’un réseau d’organismes gouvernementaux et non gouvernementaux.

Au Paraguay, les ministères de l’Éducation et de la culture, de l’agriculture et de l’élevage, de la justice, du travail, de la santé publique et de l’aide sociale et de la défense ou encore des ONG, dispensent des cours d’alphabétisation.

Source: Latin America Sub-regional Report. pp.39 - 40

Dans de nombreux pays, le taux d’alphabétisme des femmes adultes, notamment dans les régions rurales, reste plus bas que celui des hommes. Dans la mesure où la participation des filles à la scolarité primaire augmente et où leurs résultats continuent d’être meilleurs que ceux des garçons. On peut s’attendre à voir cette tendance se modifier dans les décennies à venir. Pour l’heure, il est indispensable d’obtenir une participation directe des femmes au niveau local, participation dont maints projets ont fait leur preuve sur le terrain. La coopération entre les diverses catégories d’acteurs, publics et privés, locaux et bailleurs de fonds, laisse souvent à désirer: elle peut être largement améliorée. Les priorités fixées au niveau des politiques et la coordination des actions transectorielles des pouvoirs publics sont souvent inadaptées à la tâche à accomplir. Il y a des structures bureaucratiques et des habitudes ancrées à réformer, dans le cadre d’une volonté active nationale d’obtenir des résultats. Les stratégies directives qui ne peuvent obtenir l’adhésion des communautés au niveau local et se fonder sur leurs besoins et leur motivation sont vouées à l’échec.

 

Toute leçon négative s’accompagne d’une corrélation positive implicitement traduisible en objectif pour l’avenir. Lorsque persistent des faiblesses – dans les taux de rétention et les résultats scolaires des enfants aux niveaux primaire et secondaire – il est impératif d’y remédier si l’on veut, dans l’avenir, réduire les niveaux d’analphabétisme des adultes. Réciproquement, le meilleur garant de la réussite scolaire des enfants est le niveau d’alphabétisme et d’éducation de leurs parents.

Ainsi s’affirme l’importance de stratégies de réforme à la fois globales et systématisées. L’alphabétisation des adultes, de même que l’éducation des adultes en général, doit être conçue en liaison solidaire avec les stratégies de réforme de l’éducation de base qui sont axées sur le système scolaire formel. Comme dans d’autres champs d’objectifs, il est impératif de mettre en place un contrôle et une évaluation systématiques de l’efficacité et de l’impact des programmes d’alphabétisation non formels.

Là où elle est acquise, l’universalisation de l’éducation de base laisse subsister des zones à fort taux d’analphabétisme avec des gens qui, dans leur enfance, n’ont pas reçu d’éducation de base ou dont les aptitudes ont régressé. C’est là une occasion de mettre en place des initiatives ciblées. Dans les pays d’Amérique latine où les taux de participation à la scolarité de base sont en hausse, l’attention se concentre peu à peu sur des campagnes d’alphabétisation de la population postscolaire. Mais il convient de s’attacher à ce que les enfants acquièrent effectivement à l’école par rapport aux normes reconnues en lecture, écriture et calcul. Selon les études d’évaluation des résultats de l’apprentissage dans les États africains et arabes, les résultats des tests sont, dans de nombreux pays, très inférieurs aux normes correspondant aux divers âges. L’universalisation mesurée par les taux d’inscription et de participation ne suffit pas. La persistance de l’analphabétisme chez les enfants du niveau primaire est elle-même un indicateur de l’analphabétisme des futurs adultes.

En dépit des formidables difficultés qui découlent de l’insuffisance des bases empiriques, du manque de clarté des définitions et des différentes optiques d’interprétation, plusieurs indications se dégagent de l’évaluation des objectifs en matière d’alphabétisation des adultes.

Les conclusions de l’évaluation de l’alphabétisation

  • Les bases de données sont si inadéquates que, sans un grand effort de systématisation, on ne saurait tirer de conclusions valables et d’inférences fiables ni mettre en place et appliquer des politiques cohérentes; des audits s’imposent pour garantir la transparence et l’honnêteté des rapports.
  • On constate d’une manière générale qu’une lente amélioration des taux d’alphabétisation indiqués est en cours dans de nombreux pays, avec parfois des bonds spectaculaires; il faudrait des données de meilleure qualité pour pouvoir tirer des conclusions plus sûres quant aux tendances.
  • Des disparités et des inégalités de longue date perdurent au sein des pays; il faut fixer des objectifs mieux ciblés en matière d’équité; les pays les plus pauvres, les régions les plus pauvres et les groupes les plus pauvres ne reçoivent pas tout le sou¢ien dont ils ont besoin, malgré le concours de divers donateurs et d’agences d’aide; dans les pays les moins avancés, un adulte sur deux est encore analphabète.
  • L’alphabétisation des adultes et d’une manière plus générale l’éducation non formelle sont des parents pauvres dans l’ordre des priorités de nombreux pays et ne sont touchés que marginalement par les efforts de réforme.
  • La réussite des programmes dépend de conditions très diverses: la mobilisation de ressources nombreuses et variées aux niveaux local, national et international, une bonne organisation et la poursuite de l’activité sur de longues durées, la participation §es communautés, le leadership, l’attention portée aux conditions de vie des analphabètes et le souci de susciter en eux le désir de devenir véritablement alphabètes.
  • Les politiques d’alphabétisation des adultes doivent prendre en compte les problèmes que rencontrent les enfants d’âge scolaire et les niveaux d’alphabétisme qu’ils atteignent.
  • L’alphabétisation la plus rudimentaire est un objectif intermédiaire utile, une étape sur la voie d’une culture de l’alphabétisme conçue dans un sens large.
  • On compte rendu régulier et fiable des performances enregistrées par rapport aux objectifs d’alphabétisation de base préétablis permettrait de cerner les problèmes les plus difficiles et les zones prioritaires.
Éducation des Adultes et Développement

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